endant que
la guerre civile déchirait la France sous le règne de Charles IX, l’amour ne laissait pas de trouver sa place parmi tant de désordres, et d’en causer beaucoup dans son empire. La fille
unique du marquis de Mézière, héritière très-considérable, et par ses grands biens, et par l’illustre maison d’Anjou, dont elle était descendue, était promise au duc du Maine, cadet du duc de
Guise, que l’on a depuis appelé le Balafré. L’extrême jeunesse de cette grande héritière retardait son mariage, et cependant le duc de Guise, qui la voyait souvent, et qui
voyait en elle les commencements d’une grande beauté, en devint amoureux, et en fut aimé. Ils cachèrent leur amour avec beaucoup de soin. Le duc de Guise, qui n’avait pas encore autant d’ambition
qu’il en a eu depuis, souhaitait ardemment de l’épouser ; mais la crainte du cardinal de Lorraine, qui lui tenait lieu de père, l’empêchait de se déclarer. Les choses étaient en cet état,
lorsque la maison de Bourbon, qui ne pouvait voir qu’avec envie l’élévation de celle de Guise, s’apercevant de l’avantage qu’elle recevrait de ce mariage, se résolut de le lui ôter, et d’en
profiter elle-même, en faisant épouser cette héritière au jeune prince de Montpensier. On travailla à l’exécution de ce dessein avec tant de
succès, que les parents de mademoiselle de Mézière, contre les promesses qu’ils avaient faites au cardinal de Lorraine, se résolurent de la donner en mariage à ce jeune prince. Toute la maison de
Guise fut extrêmement surprise de ce procédé ; mais le duc en fut accablé de douleur, et l’intérêt de son amour lui fit recevoir ce manquement de parole comme un affront insupportable. Son
ressentiment éclata bientôt, malgré les réprimandes du cardinal de Lorraine et du duc d’Aumale, ses oncles, qui ne voulaient pas s’opiniâtrer à une chose qu’ils voyaient ne pouvoir
empêcher ; et il s’emporta avec tant de violence, en présence même du jeune prince de Montpensier, qu’il en naquit entre eux une haine qui ne finit qu’avec leur vie. Mademoiselle de Mézière,
tourmentée par ses parents d’épouser ce prince, voyant d’ailleurs qu’elle ne pouvait épouser le duc de Guise, et connaissant par sa vertu qu’il était dangereux d’avoir pour beau-frère un homme
qu’elle eût souhaité pour mari, se résolut enfin de suivre le sentiment de ses proches et conjura M. de Guise de ne plus apporter d’obstacle à son mariage. Elle épousa donc le prince de
Montpensier qui, peu de temps après, l’emmena à Champigni, séjour ordinaire des princes de sa maison, pour l’ôter de Paris où apparemment tout l’effort de la guerre allait tomber. Cette grande
ville était menacée d’un siége par l’armée des huguenots, dont le prince de Condé était le chef, et qui venait de déclarer la guerre au roi pour la seconde fois. Le prince de Montpensier, dans sa
plus tendre jeunesse, avait fait une amitié
très-particulière avec le comte de Chabanes, qui était un homme d’un âge beaucoup plus avancé que lui, et d’un mérite extraordinaire. Ce comte avait été si sensible à l’estime et à la confiance
de ce jeune prince, que, contre les engagements qu’il avait avec le prince de Condé, qui lui faisait espérer des emplois considérables dans le parti des huguenots, il se déclara pour les
catholiques, ne pouvant se résoudre à être opposé en quelque chose à un homme qui lui était si cher. Ce changement de parti n’ayant point d’autre fondement, l’on douta qu’il fût véritable, et la
reine-mère, Catherine de Médicis, en eut de si grands soupçons, que, la guerre étant déclarée par les huguenots, elle eut dessein de le faire arrêter ; mais le prince de Montpensier l’en
empêcha, et emmena Chabanes à Champigni en s’y en allant avec sa femme. Le comte, ayant l’esprit fort doux et fort agréable, gagna bientôt l’estime de la princesse de Montpensier, et en peu de
temps, elle n’eut pas moins de confiance et d’amitié pour lui, qu’en avait le prince son mari. Chabanes, de son côté, regardait avec admiration tant de beauté, d’esprit et de vertu qui
paraissaient en cette jeune princesse ; et, se servant de l’amitié qu’elle lui témoignait pour lui inspirer des sentiments d’une vertu extraordinaire et digne de la grandeur de sa naissance,
il la rendit en peu de temps une des personnes du monde les plus achevées.
Madame de La Fayette
Mêmes problématiques :
- le mariage arrangé, l'opposition entre l'amour et le devoir, la nécessité d'une bonne éducation.
- fin différente : cf ci-dessous : elle n'a pas suivi la vertu et elle meurt dans l'opprobre.
Le duc de Guise, occupé du désir de venger la mort de son père, et, peu après, rempli de la joie de l’avoir vengée, laissa peu à peu éloigner de son ame le soin d’apprendre des nouvelles de la princesse de Montpensier ; et, trouvant la marquise de Noirmoutier, personne de beaucoup d’esprit et de beauté, et qui donnait plus d’espérance que cette princesse, il s’y attacha entièrement et l’aima avec une passion démesurée, et qui dura jusqu’à sa mort. Cependant, après que le mal de madame de Montpensier fut venu au dernier point, il commença à diminuer : la raison lui revint ; et, se trouvant un peu soulagée par l’absence du prince son mari, elle donna quelque espérance de sa vie. Sa santé revenait pourtant avec grand’ peine, par le mauvais état de son esprit ; et son esprit fut travaillé de nouveau, quand elle se souvint qu’elle n’avait eu aucune nouvelle du duc de Guise pendant toute sa maladie. Elle s’enquit de ses femmes si elles n’avaient vu personne, si elles n’avaient point de lettres ; et, ne trouvant rien de ce qu’elle eût souhaité, elle se trouva la plus malheureuse du monde, d’avoir tout hasardé pour un homme qui l’abandonnait. Ce lui fut encore un nouvel accablement d’apprendre la mort du comte de Chabanes, qu’elle sut bientôt par les soins du prince son mari. L’ingratitude du duc de Guise lui fit sentir plus vivement la perte d’un homme dont elle connaissait si bien la fidélité. Tant de déplaisirs si pressants la remirent bientôt dans un état aussi dangereux que celui dont elle était sortie : et, comme madame de Noirmoutier était une personne qui prenait autant de soin de faire éclater ses galanteries que les autres en prennent de les cacher, celles du duc de Guise et d’elle étaient si publiques, que, toute éloignée et toute malade qu’était la princesse de Montpensier, elle les apprit de tant de côtés, qu’elle n’en put douter. Ce fut le coup mortel pour sa vie : elle ne put résister à la douleur d’avoir perdu l’estime de son mari, le cœur de son amant, et le plus parfait ami qui fut jamais. Elle mourut en peu de jours, dans la fleur de son âge, une des plus belles princesses du monde, et qui aurait été sans doute la plus heureuse, si la vertu et la prudence eussent conduit toutes ses actions.
Si les hommes qui manquent d’esprit n étaient pas heureusement dispensés de le savoir et de s’en plaindre, s’ils n’avaient pas d’ailleurs assez d’amples dédommagemens, s’il fallait encore, pour les consoler, leur montrer quelque exemple éclatant d’infortune parmi ceux que le ciel semble avoir, sous ce rapport, mieux partagés, le nom du comte de Bussy-Rabutin servirait merveilleusement à cet usage. Gentilhomme et courtisan, ce fut par la vivacité naturelle de son intelligence, par le talent acquis d’écrire et de parler, qu’il perdit tous les avantages de sa position, et les gens de lettres peuvent le compter véritablement au nombre de leurs martyrs. Né comme il était, et avec les commencemens qu’on lui avait vus, s’il se fût trouvé moins habile et moins prompt à exprimer en termes choisis une pensée ingénieuse, il eût été, sans aucun doute, maréchal de France, peut-être même, la fortune aidant, un grand capitaine ; il figurerait dans les anecdotes militaires, vraies ou non, du règne de Louis XIV, et il aurait son portrait, tant bien que mal peint, à Versailles. Au lieu de cela, pour avoir eu la démangeaison, la manie, ou, ce qui revient au même, le don de médire plaisamment, sa carrière de soldat, son avancement de cour, s’arrêtèrent à la Bastille ; un long repos dans l’exil acheva par le ridicule une réputation qui avait débuté par le scandale, et, la postérité, qui se soucie assez peu de réhabiliter les gens, ayant joint ses dédains à tant de revers, il s’ensuivit que le descendant des Mayeul et des Amé, venu au monde pour être général d’armée, duc et pair et cordon bleu, avait échangé ces belles espérances contre le plus triste personnage qu’il soit possible de jouer ici-bas, celui de bel-esprit ignoré.
Le hasard eut un premier tort envers lui ; ce fut de le faire naître en Bourgogne. Avec le caractère dont il apportait le germe, il appartenait incontestablement à la Guyenne. Il n’eût certes pas démenti cette origine, et elle l’aurait servi comme elle en a servi tant d’autres qui valaient moins. En tout cas, il n’aurait pas eu la peine de créer une qualification pour les saillies brusques et hautaines de son humeur fanfaronne, et de les appeler, comme il fit, des rabutinades ; le mot générique de gasconnades aurait suffi.
Portraits de femmes : visite guidée du même château. http://paris-butteauxcailles.eklablog.com/visite-guidee-du-chateau-de-bussy-rabutin-a148044284
La reine Catherine de Médicis
La duchesse de Valentinois, Diane de Poitiers
Un homme : le duc de Nemours
La reine Dauphine, future Marie Stuart, au destin tragique
La fameuse Henriette d'Angleterre, dont Madame de La Fayette était une dame d'honneur, fille du roi Charles Ier décapitée, puis soeur du Roi Charles II, meurt à 26 ans. Femme d'esprit.
Madame de la Sablière, femme très instruite qui tenait un salon littéraire
Autre femme éclairée, Ninon de Lenclos
la Marquise de Sévigné, auteur des Lettres