Parlant du monde et de ses personnages, Albert Camus écrit dans l'Homme révolté : "Les héros ont notre langage, nos faiblesses, nos forces. Leur univers n'est ni plus beau, ni plus édifiant que le nôtre. Mais eux, du moins, courent jusqu'au bout de leur destin  et il n'est jamais de si bouleversant héros que ceux qui vont jusqu'à l'extrémité de leurs passions."

 

http://www.slate.fr/france/78766/recit-derniere-execution-capitale-magistrate

http://commentairecompose.fr/camus/l-absurde-camus/

http://salon-litteraire.linternaute.com/fr/albert-camus/content/1811029-albert-camus-biographie

Résumé : L’Étranger, d'Albert Camus (1942)

 

 

 

L’action se déroule en Algérie française. Meursault (le narrateur) apprend par un télégramme la mort de sa mère. Il se rend en autocar à l’hospice, près d’Alger. Il n’exprime ni tristesse ni émotion. Il refuse de voir le corps, mais veille le cercueil comme c’est la tradition, en fumant et buvant du café. Aux funérailles, il ne montre aucun chagrin, ne pleure pas, et se contente d’observer les gens qui l’entourent.

 

 

 

Le lendemain, de retour à Alger, Meursault va nager dans la mer et rencontre une jeune fille, Marie, une dactylo qui avait travaillé dans la même société que lui et qu'il connaît vaguement. Le soir, ils se rendent au cinéma puis reviennent à l'appartement de Meursault et couchent ensemble. Une relation se développe entre eux, au cours de laquelle il ne montre pas plus de sentiment ou d'affection envers Marie qu’à l'enterrement de sa mère.

 

 

 

Meursault fréquente son voisin, Raymond Sintès, connu pour être souteneur, qui lui demande de l’aider à rédiger une lettre : il s’est battu avec sa maîtresse qu’il soupçonne d’être infidèle et craint les représailles de son frère. Meursault accepte.

 

La semaine suivante, Marie et Meursault perçoivent les bruits d’une dispute violente entre Raymond Sintès et sa maîtresse, jusqu’à l’intervention d’un agent. Après le départ de Marie, Raymond vient demander à Meursault de lui servir de témoin de moralité. Il affirme au tribunal que la maîtresse de son voisin a été infidèle et Raymond est quitte pour un avertissement. Celui-ci invite Meursault à passer la journée du lendemain dimanche dans le cabanon de l’un de ses amis, Masson, dans la banlieue d’Alger. Dans le même temps, Meursault qui montre peu d'intérêt pour sa carrière, refuse une promotion qui le conduirait à travailler à Paris. Marie lui demande de l’épouser : il accepte, bien que cela lui soit égal.

 

 

 

Le dimanche, Marie et Meursault prennent le bus avec Raymond pour rejoindre le cabanon de Masson. Ils sont suivis par un groupe d’Arabes, dont le frère de la maîtresse de Raymond contre lequel Meursault a témoigné. Après déjeuné, les trois hommes vont se promener sur la plage, sous un soleil de plomb. Ils croisent à nouveau le groupe d’Arabes. Une bagarre éclate : Raymond est blessé au visage d’un coup de couteau. En remontant au cabanon, Meursault obtient de Raymond qu’il lui confie son révolver afin d’éviter qu’il ne tue quelqu’un. Meursault retourne sur la plage. La chaleur est accablante. Il rencontre un des Arabes qui sort un couteau. Meursault, ébloui par le reflet du soleil sur la lame, sort le revolver dans sa poche puis tout s’enchaîne : « La gâchette a cédé, j’ai touché le ventre poli de la crosse et, c’est là, dans le bruit à la fois sec et assourdissant que tout a commencé [...]. Alors, j’ai tiré encore quatre fois sur un corps inerte où les balles s’enfonçaient sans qu’il y parût. Et c’était comme quatre coups brefs que je frappais sur la porte du malheur. » Ces cinq coups de revolver excluent la légitime défense et l’homicide involontaire. Meursault ne donne au lecteur aucune raison particulière pour son crime, le fait qu’il ait tiré sur le cadavre à quatre reprises ou sur les émotions qu'il éprouve, mis à part le fait qu'il a été gêné par la chaleur et la lumière du soleil.

 

 

 

Dans la seconde partie du roman, Meursault est incarcéré et envisage avec détachement son procès à venir. Il est même assez indifférent à la privation de liberté et s’habitue à l’idée de ne pas pouvoir coucher avec Marie. Il passe son temps à dormir ou à énumérer mentalement les objets qu’il possède dans son appartement.

 

 

 

Tout au long de son emprisonnement et jusqu’à la veille de son exécution, Meursault affiche la même indifférence, semblant ne rien ressentir. Il se sent étranger à ce qui lui arrive et ne montre au procès aucun regret, ce qui met son avocat très mal à l’aise. On l’interroge sur son comportement à l’enterrement de sa mère, sur les raisons de son crime. Il ne sait que répondre que c’est à cause du soleil. Pour le procureur, Meursault est « un homme qui tuait moralement sa mère », en la laissant dans un asile. Et il l’accuse « d’avoir enterré une mère avec un cœur de criminel ». La justice ne cherche pas à comprendre les motivations de Meursault. Le procureur se concentre sur son comportement, sa personnalité, sa vie dissolue (il engage une relation le lendemain des funérailles de sa mère dont il est indifférent), son athéisme, son caractère asocial. Dans le contexte politique de l’époque, l’Algérie gouvernée par la France coloniale, il aurait pu plaider la légitime défense et être acquitté. L’avocat tente de montrer son client sous un autre jour, loin de la réalité. Meursault l’écoute, pris de vertige : « J’étais un honnête homme, un travailleur régulier, infatigable, fidèle à la maison qui l’employait, aimé de tous et compatissant aux misères des autres. » La cour rend son verdict : « Le président m’a dit dans une forme bizarre que j’aurais la tête tranchée sur une place publique au nom du peuple français. » Finalement, Meursault est condamné à mort, plus pour son indifférence aux normes de la société que pour son crime.

 

 

 

Dans sa cellule, Meursault doit affronter l'aumônier de la prison qu’il refuse de rencontrer, mais qui tente de prendre sa confession. Il lui promet une autre vie s’il se tourne vers Dieu. Meursault entre dans une grande colère et met le prélat dehors. Il est convaincu que seule la vie est certaine et que l'inéluctabilité de la mort lui enlève toute signification. C’est alors que, paradoxalement, se développe dans l’épilogue une autre posture de Meursault, celle de l’attachement matériel, sensuel, à la vie. Il se découvre surtout comme faisant partie intégrante de ce monde. Meursault est prêt, lucide et calme, si proche de la nature et si loin des hommes. C’est à travers la révolte, la colère, la violence que l’homme découvre l’absurdité de la condition humaine. « Comme si cette grande colère m'avait purgé du mal, vidé d'espoir, devant cette nuit chargée de signes et d'étoiles, je m'ouvrais pour la première fois à la tendre indifférence du monde. De l'éprouver si pareil à moi, si fraternel enfin, j'ai senti que j'avais été heureux, et que je l'étais encore. Pour que tout soit consommé, pour que je me sente moins seul, il me restait à souhaiter qu'il y ait beaucoup de spectateurs le jour de mon exécution et qu'ils m'accueillent avec des cris de haine. »

 

Parlant du monde et de ses personnages, Albert Camus écrit dans l'Homme révolté : "Les héros ont notre langage, nos faiblesses, nos forces. Leur univers n'est ni plus beau, ni plus édifiant que le nôtre. Mais eux, du moins, courent jusqu'au bout de leur destin  et il n'est jamais de si bouleversant héros que ceux qui vont jusqu'à l'extrémité de leurs passions."

 

Pour Albert Camus, la vie des individus, l'existence humaine en général, n'ont pas de sens ou d’ordre rationnel. C’est parce que nous éprouvons des difficultés à accepter cette notion que nous tentons en permanence d'identifier ou de donner une signification rationnelle à nos actes. Le terme « absurdité » décrit cette vaine tentative de l'humanité à trouver un sens rationnel là où il n'en existe pas

 

Bien que dans L'Étranger Camus ne se réfère pas explicitement à la notion de l'absurde, les principes de l'absurdité fonctionnent dans le roman. Ni le monde extérieur dans lequel Meursault évolue ni le monde intérieur de ses pensées, de même que son comportement, ne relèvent d’un ordre rationnel. Meursault n’est pas logique dans ses actes, comme sa décision de se marier ou celle de tuer l'Arabe (notamment les quatre coups de revolver tirés dans son cadavre). Néanmoins, la société, à travers la justice, tente de fabriquer ou d'imposer des explications rationnelles aux des actions irrationnelles de Meursault. L'idée que les choses se passent parfois sans raison et que les événements peuvent n’avoir aucun sens perturbe la société qui voit là une menace. Le procès, dans la deuxième partie du roman, n’est autre que la tentative de la société de fabriquer un ordre rationnel. Le procureur et l'avocat ault expliquent le crime de Meursault en se basant sur la logique, la raison, et la notion de cause à effet. Pourtant, ces explications n'ont aucun fondement et ne sont que des tentatives pour désamorcer l'idée effrayante que l'univers est irrationnel. Le livre traduit cette vaine tentative de l'humanité d’imposer la rationalité dans un univers irrationnel.

 

 

 

La deuxième composante majeure de la philosophie de l'absurde de Camus est l'idée selon laquelle la vie humaine n'a pas de sens ou de but rédempteur. Camus fait valoir que la seule chose certaine dans la vie est l'inéluctabilité de la mort. C’est parce que tous les êtres humains finiront par rencontrer la mort que toutes les vies sont dénuées de sens. Tout au long du roman, Meursault évolue progressivement vers cette révélation, mais il n’en saisit pleinement la réalité qu'après sa dispute avec l'aumônier. Parce que la révolte est la seule réponse à l’absurde. Il prend aussi conscience que son indifférence au monde est corrélée par l’indifférence du monde à son égard. Comme tout humain, Meursault est né, mourra, et n'aura plus d'importance. L’acceptation de l'inéluctabilité de la mort libère Meursault des faux espoirs. Celui notamment d’une vie durable, qui n’était en fait qu’un fardeau qu’il traînait. Il est donc libre de vivre sa vie pour ce qu'elle est, et tirer le meilleur parti des jours qui lui restent. 

 

Texte 1 : Extrait du chapitre 1 (1ère partie) “Incipit” : une nouvelle approche du récit et de ses codes.

 

Aujourd'hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J'ai reçu un télégramme de l'asile: «Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués.» Cela ne veut rien dire. C'était peut-être hier. L'asile de vieillards est à Marengo, à quatre-vingts kilomètres d'Alger. Je prendrai l'autobus à deux heures et j'arriverai dans l'après-midi. Ainsi, je pourrai veiller et je rentrerai demain soir. J'ai demandé deux jours de congé à mon patron et il ne pouvait pas me les refuser avec une excuse pareille. Mais il n'avait pas l'air content. Je lui ai même dit : "Ce n'est pas de ma faute." II n'a pas répondu. J'ai pensé alors que je n'aurais pas dû lui dire cela. En somme, je n'avais pas à m'excuser. C'était plutôt à lui de me présenter ses condoléances. Mais il le fera sans doute après-demain, quand il me verra en deuil. Pour le moment, c'est un peu comme si maman n'était pas morte. Après l'enterrement, au contraire, ce sera une affaire classée et tout aura revêtu une allure plus officielle.

 

J'ai pris l'autobus à deux heures. II faisait très chaud. J'ai mangé au restaurant, chez Céleste, comme d'habitude. Ils avaient tous beaucoup de peine pour moi et Céleste m'a dit: "On n'a qu'une mère". Quand je suis parti, ils m'ont accompagné à la porte. J'étais un peu étourdi parce qu'il a fallu que je monte chez Emmanuel pour lui emprunter une cravate noire et un brassard. Il a perdu son oncle, il y a quelques mois.  J'ai couru pour ne pas manquer le départ. Cette hâte, cette course, c'est à cause de tout cela sans doute, ajouté aux cahots, à l'odeur d'essence, à la réverbération de la route et du ciel, que je me suis assoupi. J'ai dormi pendant presque tout le trajet. Et quand je me suis réveillé, j'étais tassé contre un militaire qui m'a souri et qui m'a demandé si je venais de loin. J'ai dit "oui" pour n'avoir plus à parler.

 

Camus texte 1:

 

Pbmtq: Comment cet incipit dessinet-t-il les grandes lignes d'une homme et d'une facon de raconter différents?

 

I. un incipit atyique, qui laisse des infornations en suspens

 

a. le lieu est a deviner, comme le temps, les personnages sont peu caractérisés

 

b. ceci ressemble a un journal intime mais sans intimité ( présence du je", temps de l'énonciation): paradoxe: nous entrons dans son intimité mais il est étranger à nous.

 

c. l'organisation des événements semble linéaire, non hierarchisée, fondue dans un meme passé composé: behaviorisme, dos passos, l'être ne se perçoit que par ses actions, vues de l'extérieur.

 

II. un homme indifférent ou différent?

 

a. il n'exprime pas de sentiment, de tristesse

 

b. ceci est remplacé par le récit aveugle des actes : la recherche du costume et du ticket de bus.

 

c. le rapport a autrui est caractérisé par de l'incommunication : il ne réagit pas à la phrase de Céleste: "on n'a qu'une mère", il réagit seulement apres à celle de son patron.

 

Transition, mais on peut voir que les autres sont aussi un peu fous, absurdes, à vouloir le culpabiliser, donc l'on pourrait dire qu'il se caractérise par un autre rapport au monde:

 

III. un autre rapport au monde

 

a. la présence des sensations: elle rempkace les énoncés verbaux.

 

b. une analyse assez fine du comportement d'autrui: c'est sans doute le narrateur qui parle ici, quand il commence à distiller des caricatures sociales : des patrons moralisateurs et du qu'en dira-t-on des voisins.

 

c. un personnage honnête, qui ne veut pas raconter d'histoires: contrairement aux phrases convenues de ses interlocuteurs, ou a leur sentiments repréhensibles, il n'essaie pas de se crér des sentiments artificiels, et la citation des télégrammes montre aussi que les gens s'envoient des phrases absurdes pour se rassurer.

 

Conclusion : Cette scène sera à relire après avoir lu tout le livre, dans la mesure où tout ce qui est écrit maintenant n'est pas écrit au hasard, ni anodin, ce sont justement ces faits là qui seront retenus contre lui lors du procès, de même que l'attitude lors de la veillée et de l'enterrement. Le fait qu'il agisse en vaeugle ne le pose pas en coupable pourtant. le lecteur qui a été choqué par cette scene et qui se met contre lui sera donc surpris de voir ensuite la cruauté de ses accusateurs et donc commencera à accepter le personnage.

 

le même commentaire avec plus de rédaction (poru Imene ;-)

 

Camus texte 1:

 

Pbmtiq: Comment cet incipit dessinet-t-il les grandes lignes d'une homme et d'une facon de raconter différents?

 

I. un incipit atyique, qui laisse des infornations en suspens

 

a. le lieu est a deviner, comme le temps, les personnages sont peu caractérisés

 

En effet, on n'apprend la ville où il habite que par le détour de Marengo. On ne connait pas le moment de l'année ni la date exacte. Cette incertitude est renforcée par le fait qu'il ne sache pas si sa mere est morte ce jour la ou la veille, on ne sait d'aillerus pas a quoi fait référence le déictique: "aujourd'hui". On ne connait pas son nom. La situation d'énonciation est ancrée.

 

b. un journal intime sans intimité

 

Ainsi, le choix de Camus d'emprunter la premiere personne nous fait rentrer dans sa vie in medias res, nous conservons les mêmes coordonées spatio-temporellles que le narrateur, c'est un récit ancré dans la situation d'énonciation, et nous avons donc moins d'infornations que s'il s'agissait d'un narrateur omniscient.

 

D'autre part, la forme du journal intime est deceptive dans la mesure où normalement, le journal intime nous permet d'entrer dans l'intimité d'une perosnne or ici, on n'accede pas vraiement aux pensées et aux sentiemnts de Meursault. Il y a donc un paradoxe: nous entrons dans son intimité certes mais il semble que son intimité soit vide.

 

c. l'organisation des événements semble linéaire, non hiérarchisée

 

Les actions s'enchaînent, mais sans organisation ni préference, elles sont fondues dans un même passé composé: "Quand je suis parti, ils m'ont accompagné à la porte. J'étais un peu étourdi parce qu'il a fallu que je monte chez Emmanuel pour lui emprunter une cravate noire et un brassard. Il a perdu son oncle, il y a quelques mois.  J'ai couru pour ne pas manquer le départ. " : on pourrait parler de behaviorisme, stratégie romanesque héritée du roman américain ( notammment Dos Passos) qui privilégie le récit des actions vues de l'extérieur sans nous faire entrer dans ses pensées.

 

II. un homme indifférent ou différent?

 

a. Il n'exprime pas de sentiment de tristesse

 

Et à la place, il se focalise sur la réaction des autres, Celeste, le télégramme, le patron. Camus aussi laisse un vide sans doute pour inviter le lecteur à le combler en se faisant sa propre opinion.

 

b. Ceci est remplacé par le récit aveugle des actes: la lecture du télégramme remplace son émotion personnelle par des formules convenues de condoléances. D'autre part, la recherche du costume et du ticket de bus (citation), sont des préparations à l'action future plus qu'une analyse du sentiment présent.

 

Il est aussi différent parce que son rapport avec les vivants est présenté de façon étrange:

 

c. le rapport a autrui est caractérisé par de l'incommunication : il ne réagit pas à la phrase de Céleste: "on n'a qu'une mère", il réagit seulement après à celle de son patron, mais il le fait après coup. Il semble seul dans le monde, ou incompris.

 

Transition, mais on peut voir que les autres sont aussi un peu fous, absurdes, à vouloir le culpabiliser, donc l'on pourrait dire qu'il se caractérise par un autre rapport au monde:

 

III. un autre rapport au monde

 

a. la présence des sensations: elle remplacent les énoncés verbaux. (citations), elles semblent occulter ses sentiements, ou prendre toute la place dans la percepion.

 

b. une analyse assez fine du comportement d'autrui: c'est sans doute le narrateur qui parle ici, quand il commence à distiller des caricatures sociales : des patrons moralisateurs et du qu'en-dira-t-on des voisins.

 

c. un personnage honnête, qui ne veut pas raconter d'histoires: contrairement aux phrases convenues de ses interlocuteurs, ou a leur sentiments repréhensibles, il n'essaie pas de se créer des sentiments artificiels, et la citation des télégrammes montre aussi que les gens s'envoient des phrases absurdes pour se rassurer.

 

Conclusion : Cette scène sera à relire après avoir lu tout le livre, dans la mesure où tout ce qui est écrit maintenant n'est pas écrit au hasard, ni anodin, ce sont justement ces faits là qui seront retenus contre lui lors du procès, de même que l'attitude lors de la veillée et de l'enterrement. Le fait qu'il agisse en aveugle ne le pose pas en coupable pourtant. Le lecteur qui a été choqué par cette scene et qui se met contre lui sera donc surpris de voir ensuite la cruauté de ses accusateurs et donc commencera à accepter le personnage.

 

texte 3 (commentaire du bac de français.com

 

p 90 : j'ai pensé que je n'avais qu'un demi tour à faire ... à "sur la porte du malheur", p 93
I - Le Soleil, un actant essentiel

Le Soleil est pour ainsi dire le troisième personnage de cet extrait, il domine le texte et est omniprésent tout a long de cet extrait. Il y a d'ailleurs répétition 5 fois du mot soleil.

A - Le soleil, une présence hostile

Tout au long de l'extrait, la chaleur intense se fait ressentir comme en témoignent les termes :
 « brûlure », « brûlante »
 « un souffle épais et ardent »
 « pleuvoir du feu »
-> Le Soleil est assimilé à un véritable brasier.

De plus, il y a multiplication d'hyperboles épiques. On quitte le réalisme pour glisser vers l'univers du mythe, univers dans lequel les éléments peuvent être dotés d'une puissance, d'une volonté maléfique, d'une pensée propre.
=> Par sa présence doublement hostile, le soleil exerce une emprise à laquelle il est impossible d'échapper. Meursault le dit clairement :
« je ne me débarrasserais pas du soleil en me déplaçant d'un pas ». Il ne peut que ressentir ses terribles effets. Pour Meursault, qui est un personnage extrêmement sensoriel, il ne peut que ressentir de façon extrêmement intense cette force qui pèse sur lui.

B - Le soleil, une source de souffrance

Meursault exprime son malaise par les termes tels que « Me faisait mal », « je ne pouvais plus supporter », « m'atteignait », « douloureux ». Ce malaise va d’ailleurs jusqu'à l'idée d'une agression avec trois images qui assimilent l'éclat de la lumière à une « lame », « un glaive » et à « une épée ». Ce caractère agressif de la lumière est renforcé par des verbes qui expriment une action instantanée et brutale : « giclé », « jaillit ».
Cette souffrance devient une véritable torture : « rongeait », « fouillait ».
De plus, il y a la souffrance que produit la sueur : elle est évoquée deux fois directement : « la sueur amassée dans mes sourcils », « J'ai secoué la sueur » et une fois pas le biais d'une métaphore « ce rideau de larme et de sel ».
« J'ai secoué la sueur et le soleil » => Allitération en [s] ; ou harmonie imitative -> Bourdonnement qui traverse les oreilles de Meursault en pleine confusion.

=> Le soleil est une présence douloureuse pour Meursault, qui ne cesse d'exprimer son mal, sa douleur. Ce soleil est la cause d'un aveuglement de Meursault, au sens propre et figuré.

C - La thématique de l'aveuglement (sens propre et figuré)

Les effets nuisibles de la chaleur du soleil, de la lumière et de la sueur se concentrent sur le visage de Meursault.
Les notations descriptives montrent que le visage au complet, dans toutes ses composantes est source de souffrance : Il sent les veines de son front battre « ensemble sous la peau ». Par deux fois encore, il est question de front. Le narrateur évoque également les yeux, les sourcils sont évoqués, les cils, les paupières.
Les sensations visuelles et tactiles en viennent à se doubler d'une sensation auditive pénible : « je ne sentais plus que les cymbales du soleil sur mon front ».

=> Meursault semble submergé par la souffrance physique que provoque sur lui le soleil, il reconnaît le malaise qu'il ressent et les effets nocifs du soleil. Sa seule envie face à cette présence insupportable est de se débarrasser de sa souffrance en avançant vers la source, source de fraîcheur où se trouve l'Arabe => lieu de tous les dangers
C'est donc de ce besoin irrépressible, de ce geste instinctif que va naître la tragédie.


II - L'engrenage tragique

A - L'harmatia

Harmatia > Terme propre à la tragédie grecque antique, utilisé par Aristote qui en définit le terme dans son ouvrage l'Armétique. L'harmatia est l'erreur que commet le héros et qui déclenche le mécanisme tragique. Cette erreur est souvent un acte irréfléchi.

Ici, l'harmatia est de faire « un pas en avant ». Le soleil est la puissance supérieure qui va pousser le héros à la faute (agent de fatalité), c'est à cause de lui que le héros va commettre l'harmatia.
Il ne s'agit que d'un pas, mais il celui-ci est mis en valeur par la répétition du mot « un pas, un seul pas ».

Alors même qu'il l'accomplit, Meursault sait que ce geste est inadéquat a la situation, il va jusqu'à reconnaître son erreur : « je savais que c'était stupide ».

B - Le mécanisme tragique

Ce pas prend une importance démesurée. Ensuite se met en place un engrenage tragique en 5 étapes :
1. L'harmatia, le pas en lui-même.
2. La conséquence immédiate de ce geste, « et cette fois » => Deuxième étape qui correspond à la réaction de l'Arabe qui sort son couteau. Le soleil se reflète alors dans cette lame, et soudain, la sueur inonde le visage de Meursault.
3. « c'est alors que tout a vacillé », la nature toute entière semble se liguer contre Meursault, le corps de Meursault se tend, son doigt se crispe sur la gâchette du révolver.
4. « Et c'est là […] que tout a commencé » -> premier coup de feu
5. « Alors, j'ai tiré encore quatre fois »

=> Une fois l'harmatia commis, le héros semble pris dans l'engrenage tel un héros tragique manipulé par des forces supérieures. L'entrée du personnage dans la tragédie est ici associée/conjointe/simultanée à un embrasement de l'univers qui rappelle l'apocalypse : la mer, puis le ciel semblent se transformer en feu. Meursault, face à cet embrasement de l'univers n'agit pas de manière consciente et commet un geste instinctif : « tout mon être s'est tendu » => Crispation de la main sur le révolver.
Toute la narration semble suggérer qu'il n'est que la malheureuse victime d'une suite de circonstances incontrôlables => Victime du destin.

C - L'irresponsabilité

Les éléments semblent agir d'eux-mêmes indépendamment de la volonté de Meursault :
« La gâchette à cédé » le sujet de la phrase est la gâchette -> comme si le pistolet avait tiré tout seul.
=> Meursault semble se dédouaner du premier coup de feu.

Le premier coup de feu est évoqué de manière indirecte, il y a une ellipse du moment où il tire véritablement, comme si les choses s'étaient passées indépendamment de lui-même.

De plus, thématique de l'aveuglement par la lumière et par la sueur => Le texte insiste sur l'image du « voile », métaphore du voile qui empêche de voire la vérité, qui est ici au service de la fatalité.

Cette cécité de Meursault se prolonge jusqu'au moment fatidique du meurtre de l'Arabe, puisque c'est après avoir tiré la première fois qu'il semble retrouver la vue « j'ai secoué la sueur et le soleil », c'est seulement à ce moment-là qu'il comprend : « j'ai compris » => La lucidité s'impose dès lors qu'il commet le meurtre.
Une telle coïncidence, le fait qu'il recouvre la vue est aussi symbolique puisque le geste qu'il commet dans l'aveuglement débouche sur une prise de conscience.
Cet acte amène une cassure irrémédiable dans sa vie : pour la première fois il semble accéder à la conscience => Pour la première fois maître de son destin ?


III - Meursault, le début d'une transformation

A - Prise de conscience

Le fait de recouvrer la vue marque le début d'une transformation psychologique chez Meursault : « J'ai compris […] j'avais été heureux » -> Prise de conscience du bonheur qui avait été le sien : Pour la première fois il est capable d'utiliser un modalisateur affectif tel que « heureux » qui appartient au champ sémantique du bonheur.
Avec le meurtre, Meursault prend conscience de ce qu'il perd. Le coup de feu est une espèce de détonateur qui permet l'éveil d'une conscience : la naissance de Meursault à lui-même et au monde.
Meursault prend conscience du bonheur qui avait été le sien, par le geste même qui détruit ce bonheur.
-> Il se retrouve meurtrier à cause du soleil qui est à l’origine d'un engrenage tragique dont il est la victime et non l'auteur (quel est le sens de tout cela s'il n'est pas responsable de ses actes ?)
=> Destin absurde.

B - Meursault face à l'absurde

Une question s'impose : Pourquoi Meursault tire-t-il quatre coups supplémentaires sur le « corps inerte » de l'Arabe ?

Ces quatre coups ont cette fois été tirés en toute conscience : « j'ai compris […] alors » -> Il a pris conscience du caractère irréversible du premier coup de feu -> Il a atteint un point de non-retour : il ne sera désormais plus heureux. Il sera arrêté, condamné, et enfermé. Le bonheur est désormais impossible, et Meursault en a conscience : « Et c'était comme quatre coup brefs que je frappais a la porte du malheur ».
Meursault, plutôt que de subir le destin, décide de le prendre en charge. Plutôt que d'être victime de l'absurde, il décide d'assumer son geste en le réitérant ostensiblement 4 fois.

=> Ces quatre coups supplémentaires sont un acte d'affirmation de soi. « Et c'était comme quatre coups brefs que je frappais a la porte du malheur » => Métaphore de la porte qui permet de passer d'un état à un autre (inconscience => conscience pleine / Bonheur => malheur …). Ici, c'est Meursault qui est sujet de la phrase, donc qui fait l'action « je frappais » alors que lors du premier coup de feu, il subissait l'action « La gâchette a cédé ».

=> En tirant 4 coups supplémentaires, il décide d'assumer le destin qui est le sien, celui d'un meurtrier => Il accède en quelque sorte à la liberté.

C - La naissance de Meursault à l'écriture

La transformation psychologique de Meursault est assez forte pour qu'un nouveau langage se fasse sentir chez lui. Meursault narrateur écrit l'histoire après qu'elle se soit passée :

Incipit : Système d'énonciation propre au journal intime -> Présent de l'énonciation.
Désormais, situation d' l'énonciation au passé, il devient pleinement narrateur, il est par conséquent capable d'analyser l'histoire avec rétrospection : capable d'analyser les faits.
=> Naissance d'une écriture subjective

Maintenant, phrases plus longues et à la structure plus complexe :
* Multiplication des détails descriptifs pour évoquer les multiples sensations qui l'assaillent (tactiles, visuelles, auditives)
* Apparition d'un vocabulaire beaucoup plus poétique, à tel point que certains passages s'apparentent a de la prose poétique.
De plus, série de périphrases descriptives pour désigner le couteau : « longue lame étincelante » ; périphrases hyperboliques « glaive éclatant » puis « épée brûlante » -> Gradation qui relève également de l’exagération épique.
* Synesthésie : Correspondances entre sensations différentes qui se mêlent et se superposent.
« Je ne sentais plus que les cymbales du soleil » -> cette métaphore condense sensations tactiles, visuelles (lumière), et auditive (cymbales). Il a l'impression d'avoir la tête sur le point d'exploser tellement le sang qui bat dans ses tempes est violent.
* Poétisation du discours qui tient aussi à certains jeux de sonorités.



Conclusion

Ce passage de L'étranger, de Albert Camus, constitue un épisode charnière dans le roman :

- Meursault commet un acte irréparable qui va déterminer la suite de son existence (arrestation, condamnation à mort).
- Le récit glisse dans les registres épique et tragique :
   Epique : évocation des forces de la nature de manière hyperbolique et imagée
   Tragique : il semble être victime d'un engrenage qui le pousse à la faute fatale.
   => Naissance d'une écriture nouvelle, nettement plus poétique et grandiloquente.
- Prise de conscience du bonheur qui avait été le sien, associée à la prise de conscience de soi, qui, victime de la mécanique tragique choisi d'assumer l'absurde en tirant 4 coups supplémentaires.

plan CC texte 4 : I. une satire du monde de la justice

p 156 l'après midi les grand ventilateurs"-159 parce que j'étais trop fatigué. coll folio

 

-a. une justice qui met à l'écart l'accusé

 

l'avocat évince l'interessé: "disant "je" chaque fois qu'il parlait de moi. J'étais très étonné." "réduire a zéro", "en un certains sens, se subsituer à moi," il commente, et sa meme phrase commence par "moi". "il m'a dit de me taire".

 

b.un plaidoyer "ridicule"

 

1. "mon âme": apres l'avoir évincé, invente des faits, alors qu'au final il s'agit de sa vie.   aspect ridicule de lavocat qui dit " j'y ai lu à livre ouvert. "alors meme que le lecteur sait avec l'auteur que l'étranger est un etre difficile a déchiffrer.

 

2. qui emploie les memes arguments tres moralisants, et qui contrastent avec la nonchalance morale du perosnnage. les arguments ne reprennent pas du tout la vision camusienne ou celle de meursault du crime. ils sont par excellence ceux que veut entendre la société conformiste.

 

:" un oeuvre de l'utilité et de la gradeur de ces institution", fidèle à la maison qui l'employait""compatissant aux yeux de tous"

 

c. une importante omission :

 

un cruel manque dans le plaidoyer: l'histoire inventée par tous, selon laquelle il est coupable parce qu'il n'a pas pleuré à l'enterrement de sa mère.

 

d. l'autosatisfaction des avocats

 

Magnifique, mon cher.

 

II. Meursault mis à l'écart, évincé de la scène, dans un autre monde.

 

a. Fatigue de Meursault

 

- l'attention aux grands ventilateurs : lourdeur de la chaleur, lien entre chaleur et sa mort prochaine a cause de cette mauvaise deefense? en ce cas, lien chaleur /mort sur un mode mineur.- la sensation que la plaidoirie est interminable" me semblait ne jamais devoir finir"- "j'étais trop fatigué"- sensation de répétition

 

b. Echappée de Meursault vers un autre espace

 

 apres avoir été exclu par la pensée et la parole, il s'exclut lui meme par l'imagination, en se mettant dans un autre lieu - l'attention vers un autre espace, une autre voix: " la trompette d'un marchand de glace a résonné"- l'attention vers un autre temps:" j'ai été assailli des souvenirs d'une vie" - la présence du futur proche du retour dans la cellule,

 

- des listes de souvenirs concrets:"des odeurs d'été, un quartier que j'aimais, un certain ciel du soir"

 

- il se penche sur ses sentiments qui apparaissent depuis le meurtre  : "les plus pauvres et les plus tenaces de mes joies" poésie de ce groupe nominal.

 

- il sent qu'il se rapproche de la mort et est sensible au monde extérieur:" j'ai été assailli par les souvenirs d'une vie qui ne m'appartenait plus"

 

III. une réflexion sur la parole et la pensée, Meursault porte-aprole de Camus?

 

a. une critique des personnes qui pretendent tout savoir, parler des ames, de la rhétorique ancienne

 

Camus exerce un méfiance contre les persnnes qui ont de grandes idées ou idéologies,

 

b. un éloge de ceux qui restent discrets, observateurs, humbles, les "taiseux",

 

on remarque en effet que le peronnage doué d'observation. qu'il comprend bien la situation mais que son etat ne lui permet pas de prendre la parole ou de se défendre. camus ce fait le porte parole d'une classe sociale de pieds noirs qui travaillait dans l'ombre.

 

c. eloge d'un autre harmonie avec le monde.

 

il croit dans els sensations aussi, et une reconnexion avecle monde, une sorte d'harmonie.

conclusion : 

On voit que Meursault est peu à peu is à l'écart de son procès, qui est l'occasion pour Camus de faire une satire du monde judiciaire. Il approfondit les réactions de Meursault, toujours plus fines et convaincantes, orientées subtilement vers la sensation: le lecteur sent bien qu'il est incapable de se défendre bien qu'il soit tout à fait lucide.

 

Ouverture: Ce passage annonce la fin, où les sensations du personnage, à la veille de sa mort, vont être décuplées et décrites de manière poétique. Sa condamnation à mort se fera, de même, dans un contexte d'attention à la beauté du monde et d'indifférence à la méchanceté des hommes. 

 

« L'ETRANGER »

 

SUPPORT :EXCIPIT

 

 

 

 

 

TEXTE :

 

 

 

Lui parti, j'ai retrouvé le calme. J'étais épuisé et je me suis jeté sur ma couchette. Je crois que j'ai dormi parce que je me suis réveillé avec des étoiles sur le visage. Des bruits de campagne montaient jusqu'à moi. Des odeurs de nuit, de terre et de sel rafraîchissaient mes tempes. La merveilleuse paix de cet été endormi entrait en moi comme une marée. A ce moment, et à la limite de la nuit, des sirènes ont hurlé. Elles annonçaient des départs pour un monde qui maintenant m'était à jamais indifférent.

 

                  Pour la première fois depuis bien longtemps, j'ai pensé à maman. Il m'a semblé que je comprenais pourquoi à la fin d'une vie elle avait pris un «fiancé», pourquoi elle avait joué à recommencer. Là-bas, là-bas aussi, autour de cet asile où des vies s'éteignaient, le soir était comme une trêve mélancolique. Si près de la mort, maman devait s'y sentir libérée et prête à tout revivre. Personne, personne n'avait le droit de pleurer sur elle. Et moi aussi, je me suis senti prêt à tout revivre. Comme si cette grande colère m'avait purgé du mal, vidé d'espoir, devant cette nuit chargée de signes et d'étoiles, je m'ouvrais pour la première fois à la tendre indifférence du monde. De l'éprouver si pareil à moi, si fraternel enfin, j'ai senti que j'avais été heureux, et que je l'étais encore. Pour que tout soit consommé, pour que je me sente moins seul, il me restait à souhaiter qu'il y ait beaucoup de spectateurs le jour de mon exécution et qu'ils m'accueillent avec des cris de haine.

 

 

 

La clausule ou l’excipit: « Lui parti » jusqu’à la fin.

 

 

 

Problématique: Dans quelle mesure cette clausule ramène la paix et le retour au calme ?

 

 

 

I) Une fin symbolique: le retour au calme, dans tous les sens du terme

 

            A) Le retour au calme du personnage

 

- « Lui parti, j’ai retrouvé le calme »: La structure paratactique de cette indépendante indique un rapport de cause à effet entre le départ de l’aumônier et ce retour au calme. La présence de l’homme d’église fut un véritable supplice pour le condamné, et c’est d’ailleurs la seule fois du roman où il se mettra littéralement en colère. L’emploi de l’article défini « le » est à prendre en syllepse (il recouvre tous les sens du terme), car il indique que Meursault a retrouvé son calme et le calme de sa cellule, il a donc une valeur hyperbolique d’insistance.

 

- L’emploi hyperbolique du verbe « se jeter » indique l’épuisement du héros, et l’ellipse narrative qui suit (il se réveille avec des étoiles sur le visage: la périphrase métaphorique montre que c’est déjà la nuit) met en exergue le fait qu’il a dormi longtemps et profondément, sans même s’en rendre compte («je crois »).

 

 

 

            B) Le calme de la nature: symbiose du personnage et de la campagne

 

- Champ lexical de la nature: « des bruits de campagne, des odeurs de nuit » + Déterminant indéfini pluriel « des » + Compléments du nom « campagne » et « nuit »: Impressionnisme, effort de la sensation rendue, idée de paix et de douceur.

 

- Vocabulaire axiologique (qui livre un jugement) mélioratif: verbe « rafraîchir », adjectif « merveilleuse paix » + connotation féerique de ce même adjectif: Meursault se sent bien, il entre en communion avec la nature. Accentué par la métaphore « La merveilleuse paix de cet été entrait en moi comme une marée. ». La comparaison « comme une marée » met en exergue la fusion des éléments champêtres et maritimes.

 

 

 

            C) En paix avec lui-même et avec sa mère

 

- Meursault entre en communion avec sa mère: « Pour la première fois depuis bien longtemps, j’ai pensé à maman. »: valeur des locutions adverbiales de temps qui marquent le caractère exceptionnel de cette pensée. Elles marquent un déclic.

 

- Sémantisme du verbe « comprendre » et des comparaisons (là-bas aussi, le soir était comme une trêve mélancolique). Comme elle « près de la mort » (métaphore), Meursault la rejoint et communie avec elle.

 

 

 



 

II) L’acceptation de sa mort et de sa vie

 

            A) L’acceptation de l’aube

 

- Si les chapitres précédents Meursault attend fébrilement l’aube et son pourvoi, ici, le ton change: « A ce moment, et à la limite de la nuit, des sirènes ont hurlé. Elle annonçaient des départs pour un monde qui maintenant m’était à jamais indifférent »: Si les indicateurs temporels marquent un moment clef, une rupture avec la paix de la nature (rupture mise en exergue par le sémantisme hyperbolique du verbe «hurler »), l’euphémisme « un départ pour un monde », qui veut dire la mort du héros, et l’adjectif attribut « indifférent », lui-même renforcé par l’adverbe de temps « à jamais » mettent en exergue un changement psychologique et l’acceptation de son destin.

 

 

 

            B) La corrélation entre la vie et la mort et valeur cathartique de ce dénouement

 

- La mort et la vie vont se trouver de nouveau associées dans l'ultime corrélation : entre la mort et la libération, c'est-à-dire l'approche de la mort est vécue comme une délivrance « si près de la mort, maman devait s'y sentir libéré ».

 

- « maman devait s'y sentir libérée et prête à tout revivre » (l.83) // « et moi aussi, je me suis senti prêt à tout revivre ». Cette même corrélation renvoie à une construction en miroir qui suggère un retour vers l'origine, il y a une corrélation sémantique entre cette origine et la maternité, laquelle est niée dans l'ensemble du roman.

 

- « Comme si cette grande colère m’avait purgé du mal »: cette subordonnée comparative et hypothétique met en valeur métaphoriquement le rôle cathartique, voire rédempteur, de la colère.

 

- Présence du tragique : solitude du héros, face à l’aumônier qui représente « tous les autres ». A la fois dans le discours indirect libre et dans le monologue intérieur. Mention de la mort, du destin. Martèle sans arrêt le « je ».

 

- Champ lexical du calme et de la paix recouvrée : le second moment de l’extrait correspond à un calme, une forme de dépassement de soi-même, ou encore l’accès au sublime : « j’ai retrouvé le calme », « épuisé », « merveilleuse paix », « pour la première fois depuis longtemps », etc.

 

 

 

            C) Acceptation de sa mort

 

- « Je m’ouvrais pour la première fois à la tendre indifférence du monde. »: Cette métaphore met en exergue l’apaisement du héros et l’acceptation de la mort et de ses conséquences. L’oxymore « tendre indifférence » révèle la condition humaine, l’homme est mortel et finit dans l’oubli. C’est irrémédiable, il ne reste qu’à l’accepter. La synecdoque hyperbolique généralisante « du monde » insiste sur la solitude du héros et sur sa différence. Le complément circonstanciel de temps « pour la première fois » marque une rupture avec son passé, et la valeur initiatique de cet instant hors du commun: Meursault sait qu’il va mourir dans quelques instants.

 

- « J’ai senti que j’avais été heureux et que je l’étais encore », la valeur rétrospective du plus-que-parfait, et celle durative de l’imparfait qui a même une valeur de présent (on pourrait le remplacer par «et que je le suis encore ») montrent la prise de conscience du héros et l’acceptation de son passé et de son présent. Le sémantisme de l’adjectif attribut « heureux » semble paradoxal en cette occasion et ne sert qu’à amplifier cette prise de conscience et ce moment charnière.

 

- Le dernier paragraphe achève cette acceptation de la mort et cette certitude d’être seul et bientôt oublié: « il me restait à souhaiter […] que les spectateurs m’accueillent avec des cris de haine ». Le groupe nominal « cris de haine » exprime le désir porté à son paroxysme d'être séparé des hommes.

 

 

 

 

 

 

 

III) L’absurde paradoxe de la condition humaine.

 

            A) La disparition de la linéarité du temps

 

- Tout au long du roman, nous avons vu que Meursault était sans arrêt prisonnier d’un temps isolant : son champs d’action et de pensées semble se limiter au temps présent et au passé ou futur très proche.

 

- Dans la première partie de notre extrait, la temporalité semble particulièrement importante. Pour la première fois, le narrateur envisage sa vie dans un champ temporel beaucoup plus large, et pire encore, n’hésite pas à imaginer un nouveau futur : « J’aurai pu vivre », ou encore « du fond de mon avenir… les années pas plus réelle que je vivais ». C’est éminemment paradoxal, étant donné que seules quelques heures le séparent de son exécution ! Or, au moment de mourir, sa vie prend une importance dans le temps encore inédite, voire même fantastique : voir image du « souffle obscur » qui « remonte » du futur.

 

- Il semble que les trois temporalités se mélangent alors, se confondent dans un instant présent qui abolit toute idée scientifique du passé et de l’avenir. Rien d’étonnant qu’il se sente « prêt à tout revivre » : il en a la possibilité, dans ce nouvel étirement infini du temps.

 

 

 

            B) Acceptation de sa différence

 

- La proposition principale « il me restait à souhaiter » + le sémantisme du verbe et son COI (« me restait ») + La négation restrictive « ne plus » met en valeur l’idée de l’absence de tout désir, l’acceptation de sa condition d’incompris, d’ « étranger » et sa volonté d’aller jusqu’au bout dans sa différence.

 

- Le paradoxe contenu dans la dernière phrase (« se sentir moins seul » et « être accueilli avec des cris de haine ») révèle, de façon ironique, que Meursault renonce à être aimé et compris, qu’il accepte sa différence, et que, plus on le haïra, plus il s’acceptera, lui, et l’absurdité de sa vie. Notons la violence de ces derniers mots qui terminent le roman et contrastent fortement avec la paix et la douceur qui règnent sur tout ce qui précède. C’est comme si Camus avait voulu mettre en avant l’incompréhension et la violence qui régissent les rapports humains et les condamnent à une mort solitaire.

 

 

 

            C) Même absurde, la vie vaut d’être vécue

 

- « Pour que tout soit consommé » : Cette métaphore conclusive est révélatrice et à prendre en syllepse. La vie de Meursault va prendre fin, et avec elle, le roman lui-même.

 

- Cette clausule ramène donc le calme et la sérénité dans l’esprit du héros, tout en mettant l’accent sur la condition humaine face à l’absurdité de la vie et de la mort. Pourtant, Camus veut nous faire comprendre que, même absurde, la vie vaut d’être vécue, envers et contre tous. Réconcilié avec la mort et avec lui-même, Meursault devient le symbole d’un homme qui accepte sa condition, aussi absurde soit-elle.

 

 

Documents complémentaires : 

Douze hommes en colère : 

points communs  : 

Dans le film on retrouve : 

- les préjugés négatifs sur un garçon un peu marginal

- le désintérêt  apriori sur ses raisons et sa possible innocence

- la paresse des jurés et des avocats qui ne font pas le vrai travail de défense

- la grave responsabilité de la condamnation à mort

- la critique sociale : le manque de considération envers les taiseux et les marginaux. 

 

Différences  :  

- il est innocenté

- il y a des vrais jurés

- il y a un vrai travail d’argumentation où les faux témoignages sont démasqués.

- l’égoïsme est remis en question. 

 

Douze hommes en colère (12 Angry Men) est un drame judiciaire américain réalisé par Sidney Lumet et sorti en 19571.

 

Aux États-Unis, un jury de douze hommes doit statuer, à l'unanimité, sur le sort d'un jeune homme accusé de parricide. S'il est jugé coupable, c'est la chaise électrique qui l'attend.

Onze jurés le pensent coupable. Seul le juré no 8, un architecte, n'est pas certain de la culpabilité de l'accusé et a de sérieux doutes. Il les expose les uns après les autres. Des failles existent dans l'enquête, comme le couteau qui a été utilisé. Selon les enquêteurs c'était une pièce unique alors que ce couteau à cran d'arrêt est trouvable pour six dollars dans une boutique de prêt sur gages.

Après une discussion de quelques minutes, le juré no 8 propose un nouveau vote en secret sans qu'il y prenne part et propose que si tous votent coupable il se rangera à la décision majoritaire. Dans le cas contraire, ils discuteront de l'affaire. Le juré no 9 vote non-coupable car il comprend les doutes exprimés et lors du premier vote a semblé être emporté par le vote des 10 autres jurés qui ont voté coupable.

Le débat arrive ensuite sur le témoin auditif qui dit avoir entendu le corps tomber et le garçon crier : « Je vais te tuer », alors que le bruit du métro ne permettait pas d'entendre. Le juré no 5 change d'avis et vote non coupable bien que le juré no 3 ait fait pression sur lui de manière agressive auparavant.

Le juré no 11, qui avait déjà des doutes, interroge l'assemblée sur la pertinence d'expliquer par la simple panique le fait que le garçon ait laissé son couteau sur les lieux du crime. En effet, il n'y a pas d'empreintes sur le couteau, dont le manche a été essuyé. Cela voudrait donc dire que, paniqué, il essuie le manche de son couteau, et le laisse sur les lieux. Ce qui semble peu crédible. Un nouveau vote est décidé autour duquel, après une hésitation, le juré no 11 vote non-coupable.

Le débat se prolonge à nouveau sur le témoin auditif qui dit également avoir vu le garçon s'enfuir après le crime. Pourtant, lorsque le juré no 8 fait une reconstitution du trajet entre le lit du vieillard et sa porte, il s'avère que le temps est beaucoup plus long en réalité que celui établi dans le témoignage. Le juré no 3 perd son calme et veut s'en prendre physiquement au juré no 8 en lui disant qu'il va le tuer, ce qui démontre que cette phrase peut être prononcée sans vouloir passer à l'acte. Deux jurés, les no 2 et no 6, changent leur vote et sont en faveur de la non-culpabilité.

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Scène du film ou le jury se retrouve pour délibérer

Le débat se poursuit ensuite sur l'attitude de l'accusé qui est revenu chez lui trois heures après le crime et qui s'est fait interpeller, les jurés partisans de la non-culpabilité démontrent que l'accusé n'aurait pu agir ainsi s'il avait réellement commis le crime.

Vient ensuite la façon dont l'arme a été utilisée ; l'accusé savait apparemment bien s'en servir. Pourtant, le juré no 5 démontre que l'arme du crime a été employée d'une façon maladroite car il sait comment les jeunes manipulent ce type d'arme dans le quartier où a eu lieu le meurtre. Trois nouveaux jurés changent d'avis et votent "non-coupable". Il ne reste que trois jurés à retourner pour obtenir l'unanimité et prononcer le verdict : le juré no 3 maintient vigoureusement son accusation contre le jeune homme et veut son exécution rapide, le juré no 10 explique que l'accusé vient d'un quartier pauvre et donc qu'on ne peut lui faire confiance, et tente de convaincre les autres qu'il a raison, utilisant des arguments ouvertement racistes, mais plus personne ne l'écoute et tous lui tournent le dos pour montrer leur désapprobation.

Le juré no 4 se fie au témoignage oculaire d'une femme qui dit avoir vu le crime. Pourtant, le juré no 9 a remarqué qu'elle avait lors de l'audience des traces sur le haut du nez, démontrant qu'elle porte des lunettes, or, elle disait s'être couchée et être dans son lit au moment où le crime s'est produit, donc qu'elle ne devait pas les porter, et donc qu'il y a un doute sur le fait qu'elle ait pu voir nettement la scène.

Les jurés no 4 et no 10 votent non-coupable. Le juré no 3, isolé, tente de défendre sa position mais face au silence réprobateur des onze autres jurés, il éclate en sanglots et l'on s'aperçoit que c'est son conflit avec son propre fils qu'il projetait dans cette affaire.

 

Le scénario du film sert de révélateur des motivations et des préjugés d'hommes issus de milieux différents. Le verdict final est la non-culpabilité et les jurés sortent du tribunal.

 

 

Document complémentaire : l’Etranger  :  Baudelaire.

extrait de Le Spleen de paris

- Qui aimes-tu le mieux, homme énigmatique, dis ?

ton père, ta mère, ta soeur ou ton frère ?

- Je n'ai ni père, ni mère, ni soeur, ni frère.

- Tes amis ?

- Vous vous servez là d'une parole dont le sens m'est

resté jusqu'à ce jour inconnu.

- Ta patrie ?

- J'ignore sous quelle latitude elle est située.

- La beauté ?

- Je l'aimerais volontiers, déesse et immortelle.

- L'or ?

- Je le hais comme vous haïssez Dieu.

- Eh ! qu'aimes-tu donc, extraordinaire étranger ?

- J'aime les nuages... les nuages qui passent... là-bas...

là-bas... les merveilleux nuages !

 

Points communs avec l’étranger de Camus : 

- le lien affectif avec les personnages de la famille n’est pas clairement explicité

- il n’a pas réellement un intérêt fort vis à vis des institutions, de la patrie

- il aime rêver à des détails de la vie naturelle : les arbres, la mer, ici, les nuages : il est poète 

- il n’est pas gouverné par l’intérêt ( refuse d’aller à paris, ne monte pas en grade dans son entreprise, n’est pas ambitieux) : fait tranquillement son travail.

- il est bien extra-ordinaire: il sort de l’ordinaire, 

=sa marginalité peut être assimilée à celle du poète qui ne regarde pas les mêmes choses que les hommes installés dans leur métiers, leurs relations sociales; il est anticonformisme : Camus nous rappelle que la dictature des institutions, souvent pleine de préjugés est révélatrice d’un monde absurde où l’homme comme un mouton sur la pensée générale sans être attentif à ses propres sensations.