vocabulaire de l'argumentation : http://www.etudes-litteraires.com/argumentation.php#8

http://lewebpedagogique.com/drmlj/files/2008/12/demontrer_argumenter_tabl_synoptique.pdf

http://www.etudes-litteraires.com/argumentation.php#7

conférence sur JJ Rousseau http://www.youtube.com/watch?v=xYh5YvpKMbU

1. Qu’est-ce qu’un essai ?

n Le terme, issu du latin, désigne au Moyen Âge une tentative, une preuve. Son usage au XVIe siècle (tester un goût, les effets d’un aliment) introduit la notion d’expérimentation. Au XVIe siècle, sous l’influence de Montaigne, il prend une acception littéraire : un essai est alors un ouvrage en prose qui traite d’un sujet, sans viser à l’exhaustivité.

n Les essais sont des œuvres en prose, à visée argumentative, et ne relevant pas de la fiction. Leurs sujets sont de toute nature. L’essai restitue la pensée d’un individu (c’est donc une œuvre subjective), à un moment donné, sur un thème quelconque. C’est un genre qui admet une grande souplesse dans sa forme : la définition en reste assez large pour recouvrir des oeuvres très diverses.

2. Les Essais de Montaigne, une œuvre de référence

n C’est à Michel de Montaigne (1533-1592) que nous devons le sens littéraire du mot. Les Essais constituent un ouvrage unique en son genre et présentent un aspect autobiographique : Montaigne y parle de lui, de sa vie (cf. sujet type bac p. XX). Les Essais proposent au lecteur plusieurs états de la pensée de l’écrivain sur des sujets divers, classés par chapitres. Montaigne n’a jamais cessé de modifier son œuvre en procédant à des ajouts : il existe ainsi trois éditions augmentées et complétées des Essais, en 1580, 1588 et 1590.

n Montaigne, très érudit, se nourrit des auteurs qui l’ont précédé (avec une préférence pour ceux de l’Antiquité) et confronte ses idées, ses opinions aux leurs. En quelque sorte, il essaie sa pensée en la frottant à celle des autres et invite le lecteur à faire de même avec la sienne. Il fait l’essai de son jugement mais témoigne des essais de sa vie, c’est-à-dire de ses expériences personnelles. Il aborde des sujets universels et existen- tiels (relation de l’homme à la mort), des questions liées à l’actualité de son époque (conquête du Nouveau Monde).

n C’est une œuvre originale, difficile à classer et qui témoigne d’une expérience unique dans la littérature. Montaigne apparaît, à travers les Essais, comme une figure emblé- matique de l’intellectuel humaniste (voir p. XX) et, plus largement, de l’intellectuel, dans la mesure où il refuse toute pensée figée.

3. Les caractéristiques de l’essai

n La première caractéristique de l’essai, c’est qu’il exprime un avis subjectif ; l’essai est donc le plus souvent rédigé à la première personne. L’individu qui donne son opinion se présente comme un amateur, il n’est pas forcément un spécialiste des questions qu’iltraite. Il cherche à convaincre le lecteur de la validité de sa vision des choses. On y trouve trace d’un ton personnel. nToutefois, les démarches des auteurs sont trèsvariées. On peut tenter d’endistinguer trois :

 

 

objectifs

Exemples

L’essai analytique

Démarche proche du constat, qui donne au lecteur des éléments pour mieux comprendre tel ou tel phénomène de société, qu’il explique et clarifie

Dans son Histoire des origines de la France contemporaine (1875-1893), Hippolyte Taine étudie les causes de la révolution française.

L’essai démonstratif :

le traité

Démarche rigoureuse, qui aborde de façon systématique un sujet unique et délimité.

Le Deuxième sexe (1949)
de Simone de Beauvoir est consacré à l’étude des formes d’assujettissement dont les femmes ont été et sont encore victimes à l’époque de l’écriture de l’ouvrage.

L’essai polémique : le pamphlet

Démarche volontairement provocatrice, qui exprime une indignation devant un fait ou un phénomène de société

Dans La défaite de la pensée (1987), Alain Finkielkraut conteste la tendance moderne à galvauder le mot culture en l’utilisant pour désigner tout et, selon lui, n’importe quoi.

Auteurs

Titres

Époque

origine

Ésope

Fables

- VIIe /VIe siècle av. JC
- reconstituées en recueil par le moine Planude au XIV
e siècle.
- publiées au XVII
e siècle

Antiquité grecque

Phèdre

Fables

- 50 apr. J.-C.
- redécouvert à la fin du XVI
e siècle

Antiquité romaine

Pilpaï

Le livre des Lumières

- IIIe siècle apr. J.-C.
- traduit en France en 1644

Inde

rutebeuf, Jean Bodel d’Arras et anonymes

Fabliaux

vers 1300

France

Marot

Epîtres

1526

France

La Fontaine

Fables

1668-1693

France

Fénelon

Fables

vers 1690

France

Florian

Fables

1792

France


4. Les thèmes de l’essai

n L’essai aborde des questions à valeur générale, dites universelles, qui sont d’ordre existentiel, comme la liberté, la justice, la place de l’homme dans l’univers (ex. : Patience dans l’azur, de l’astrophysicien Hubert Reeves, 1981).
n Il peut aussi nous offrir une réflexion sur des problèmes d’actualité et réagir à ceux-ci (ex. : La Société de consommation, ses mythes, ses structures, Jean Baudrillard, 1970)

n Les ouvrages spécialisés dans les sciences humaines, comme l’histoire, l’économie ou l’ethnologie sont aussi appelés essais (ex. : Mœurs et sexualité en Océanie, Margaret Mead, 1963)

B La Fable

 

n La fable combine un contenu (une histoire d’animaux) et une intention : la fable à l’origine, vise à se moquer. En tant que texte littéraire, c’est une variante de l’apologue. La fable est un petit texte en vers composé d’un récit et d’une morale. La morale peut être exprimée au début (prologue) ou à la fin (épilogue).

n Les grands recueils de fables de l’Antiquité ont inspiré directement les auteurs fran- çais.

n Deux conceptions de la rhétorique s’affrontent pendant l’Antiquité :

1. Qu’est-ce qu’une fable ?

n Le mot vient du latin fabula (du verbe fari « parler »), qui signifie récit, propos. Dès le XIIe siècle, le terme est utilisé pour désigner un récit imaginaire : une fable est une histoire. Le fabliau, quant à lui, est un petit récit satirique ou moral en octosyllabes, genre pratiqué au Moyen Âge. Il était destiné à être lu publiquement et à faire rire.

n La Fontaine va adapter la fable au goût de son époque et donner au genre la forme que nous lui connaissons. Au fil des recueils qu’il publie (1668 pour le premier, 1678-1679 pour le second, 1693 pour le dernier), il s’écarte de ses modèles. Il affine sa poétique en travaillant le mimétisme qui lui permet d’accorder sons et sens ; il fait entendre son opinion personnelle et finit par se montrer pessimiste et misanthrope.

2. Un récit fait pour plaire

n La fable se compose de deux parties, que La Fontaine nomme le corps (récit) et l’âme (morale). Le récit se doit d’être distrayant et agréable à lire. Le fabuliste met en scène des personnages variés : animaux bien sûr (« Les Animaux malades de la peste »), humains (« Le Curé et le Mort »), mais aussi des végétaux (« Le Chêne et le Roseau »). Ceux-ci sont présentés avec un certain pittoresque ; en effet, l’animal est souvent évoqué dans son environnement naturel, son mode de vie et ses traits dominants sont reconstitués. Il y a un aspect quasi scientifique dans le bestiaire des Fables de La Fontaine : la descrip- tion des Grenouilles dans « Les grenouilles qui demandent un roi » et de leur prédateur, la Grue,est l’œuvred’u nobservateur attentif du monde animal.

Éléments traditionnels

Caractéristiques

Exemples

La structure

un héros doit quitter un univers protégé pour se lancer dans une quête. Au cours de celle-ci, il
sera soumis à des épreuves et rencontrera des adjuvants et des opposants. Le dénouement permet au héros de trouver le bonheur.

Candide doit quitter le château du baron Thunder-ten-tronck. Il parcourt le monde. Cacambo et Martin seront des compagnons fidèles. Ils courront maints dangers (notamment d’être les prisonniers des Oreillons, une tribu anthropophage). Mais enfin, Candide pourra vivre heureux dans une métairie, entouré de

ses amis.

Les personnages

Ils n’ont pas de véritable identité et leurs noms sont souvent symboliques.

Les noms de Candide, de l’Ingénu et de Micromégas sont lourds de sens et très évocateurs.

Les lieux

Ils sont imaginaires.

Les pays d’Eldorado (Candide) ou des Gangarides (la Princesse de Babylone)

Le merveilleux

De nombreux faits sont extraordinaires.

Candide ne vieillit pas, Pangloss ressuscite, on rencontre des Phénix, des moutons rouges...

Le voyage

Les déplacements ont un rôle initiatique et le héros apprend bien des choses au fil de son périple : le conte philosophique est un récit d’apprentissage.

Après bien des mésaventures qui prouvent à Candide l’existence du mal, celui-ci forge sa propre philosophie : « Cultivons notre jardin ».


n Pour distraire, le récit se doit d’être vivant. La Fontaine utilise différents types de vers et fait alterner alexandrins et octosyllabes pour varier le rythme. Il donne la parole à ses personnages et recourt à toutes les formes de discours (direct, indirect, indirect libre). Il utilise des éléments dramatiques, et définit la fable comme « une ample comédie à cent actes divers ». Mais on y trouve aussi des éléments romanesques et épiques.

n Si le « corps » de la fable est l’objet d’un travail stylistique précis, il n’en reste pas moins que c’est son âme qui lui donne un sens.

3. Un récit fait pour instruire

n La Fontaine a toujours affirmé la fonction didactique de ses textes :
« Je me sers d’animaux pour instruire les hommes », Épître au dauphin
Les sujets abordés sont donc généraux (tout ce qui concerne les défauts humains, comme la gourmandise, la cupidité, la vanité...) et traités de façon satirique (pour montrer le ridicule par l’excès), ou abordés sous un angle plus philosophique (l’homme face à la peur de la mort).
n Le contexte politique marque également les fables : les textes consacrés à la dénoncia- tion du pouvoir tyrannique et de ses excès sont nombreux (le lion est sans conteste une projection de Louis XIV). En outre, La Fontaine nous livre ses goûts personnels dans quelques fables où il prône un mode de vie inspiré par l’épicurisme. On peut même parler de lyrisme et d’une tendance à l’autobiographie, comme dans « Les deux Pigeons » (« J’ai quelquefois aimé... »).
n Le caractère universel des fables laisse cependant affleurer les préoccupations d’un homme du XVIIe siècle qui vivait dans le monde de la Cour. La Fontaine n’est pas un révolutionnaire et ne semblant pas croire aux vertus de l’homme, il préfère lui proposer des morales pragmatiques. Les fables ressemblent parfois à un manuel de la vie en société à l’époque classique.
n À l’époque moderne, le terme fable peut qualifier un roman, un film, s’ils nous délivrent un message moral.

A Le conte philosophique
1. Qu’est-ce qu’un conte philosophique ?

n Le conte philosophique, comme son nom l’indique, emprunte au conte et à la phi- losophie. Il relève donc de la fiction mais sa visée philosophique fait qu’il recèle une signification dépassant le récit. C’est un genre qui apparaît au XVIIIe siècle avec le mouvement des Lumières.

n Il existe des contes moraux et satiriques au Moyen Âge mais ils appartiennent à la tradition orale. Le VIIe siècle va apprécier cette forme et lui donner des contenus variés : vocation licencieuse (contes libertins de La Fontaine) ou morale (conte de

L’argumentation 25

fées de Perrault). La traduction des contes des Mille et Une Nuits va apporter le goût de l’exotisme.
n Le conte philosophique combine ces différents aspects. Il peut être défini comme un récit invraisemblable et merveilleux, qui intègre une quête de la vérité par l’exercice de la raison. Voltaire est le maître du conte philosophique et Candide (1759) l’œuvre emblématique du genre.

2. Les aspects traditionnels du conte

Cours

Genre

Caractéristique

Exemple

Le discours

C’est d’abord une forme orale à caractère public. Il peut avoir été réellement prononcé : dans ce cas, il est vrai ; il peut aussi être placé dans la bouche d’un personnage imaginaire : il est alors fictif. Le discours est un acte
de communication qui met en relation un locuteur et un interlocuteur.

Oraisons funèbres

(1670), Bossuet

Le dialogue

Le terme vient du grec dialogos et a été utilisé pour parler d’un entretien philosophique à
la manière de Platon (philosophe du V
e/IVe siècle av. J.-C.). À partir de ce modèle antique, le dialogue a été défini comme un genre littéraire se caractérisant par l’emploi du style direct dans une forme dialoguée mettant en scène un affrontement d’idées.

Le neveu de Rameau (1760- 1777), Jacques le fataliste et son maître (1773) Denis Diderot

L’apologue et la parabole

- Les apologues sont de courts récits à vocation pédagogique. L’origine de l’apologue est attribuée à Platon. Il a été pratiqué dès l’Antiquité, en Grèce par Esope (VIe siècle av.J.-C.) et à rome par Phèdre (1er siècle apr. J.-C.)
- Les paraboles sont liées aux évangiles, qui relatent la vie du Christ.

Le mythe de
la caverne,
IVe siècle av. J.-C., Platon
La parabole du bon Samaritain, Ier siècle apr. J.- C., Luc, 10, 30,

Le conte de fées

- Forme liée à la petite enfance, derrière laquelle se cache un message à portée morale. - Le conte procède donc de la fiction (c’est
un récit imaginaire) et de l’argumentation,
car il vise à agir sur un public, à le convaincre d’opter pour telle conduite plutôt que pour telle autre.

Contes de ma mère l’Oye, (1697), Charles Perrault

L’utopie

- Notion apparue au XVIe siècle dans un contexte de bouleversement des idées, l’utopie s’épanouit au XVIIIe siècle avec le culte de la raison et l’espoir d’une société meilleure.

- Utopie est un terme issu du grec « topos » qui désigne le lieu, et « u-» qui pourrait être un préfixe privatif (l’utopie serait donc « nulle part »), ou venir du préfixe « eu- » qui renvoie à l’idée de bonheur (l’utopie serait donc aussi un lieu idéal).
- À la fin du XIX
e, et au XXe siècle, la foi dans le progrès laisse place au doute et conduit à la contre-utopie.

- dans Utopia (1516), Thomas More décrit une cité située sur l’île de nulle part et régie par un gouvernement idéal.

- dans Le Meilleur des mondes (1932), Aldous Huxley décrit

un univers totalitaire imaginaire

sujets essentiels

Approche philosophique

Le pouvoir, les institutions

- Critique des formes politiques existantes (en situant l’action dans un autre pays, lointain ou imaginaire)
- Invention d’un monde meilleur (à l’intérieur d’utopies)

Le relativisme

- Confrontation du héros à des situations et à des événements nombreux, en parcourant le monde (Candide) ou venant d’ailleurs (Micromégas)
- Face à la diversité des croyances et des pratiques, ils montrent que la tolérance est préférable au fanatisme.

La violence et l’injustice

- Condamnation de l’arbitraire de la justice. - Condamnation de la guerre

Le bonheur

Quête du héros, à la recherche d’un idéal.


3. Les aspects philosophiques

n Voltaire précise clairement la fonction qu’il assigne au conte philosophique : « Je voudrais surtout que, sous le voile de la fable [fable est ici synonyme de récit inventé], il laissât entrevoir aux yeux exercés quelque vérité fine qui échappe au vulgaire. », Le taureau blanc. Ce type d’œuvre suppose un lecteur averti et capable de reconnaître les codes du récit qui lui est proposé.

n Le choix du conte philosophique permet d’éviter la censure puisque le récit se donne comme fiction destinée à distraire ; la fantaisie ou le caractère exotique servent de masques à la critique. Le conte philosophique est une véritable « arme » littéraire au ser- vice des idées : il a des sujets de prédilection et une approche particulière de ceux-ci.

 25 D Les autres genres argumentatifs majeurs

 

n L’originalité de cette forme réside dans le dosage subtil qui s’opère entre narration et philosophie. La démonstration passe par l’anecdote. L’ironie est le procédé par excellence du conte philosophique. Elle instaure une connivence avec le lecteur qui apprécie que l’on se moque avec esprit, même si le sujet est sérieux. Le conte phi- losophique réalise la synthèse, comme la fable, de la littérature de distraction et de la littérature d’idées.

 

n Michel de Montaigne (1533-1592)

humaniste imprégné de culture antique, maire de Bordeaux, ami d’Étienne de la Boétie, Montaigne est l’inventeur du genre de l’essai. Écrits dans sa bibliothèque, où il vivait retiré, les trois tomes des Essais sont restés ouverts aux innombrables ajouts de leur auteur, jusqu’à sa mort. ils forment une œuvre monumentale de 107 chapitres. Montaigne cultive l’art de la digression, passant des confidences autobi- ographiques aux remarques érudites pour en tirer une philosophie pleine de sagesse sur tous les sujets de la vie. il y fait preuve de sens critique et de tolérance. On ne peut pas cantonner Montaigne dans une école phi- losophique ; seul son penchant au doute le rapproche du scepticisme.

« Je suis moi-même la matière de mon livre : ce n’est pas raison que tu emploies ton loisir en un sujet si frivole et si vain »

« Parce que c’était lui, parce que c’était moi »

n Blaise Pascal (1623-1662)

Génie précoce, inventeur de la machine à calculer, pascal se convertit à 23 ans au jansénisme. très pieux, il n’abandonne cependant pas ses recher- ches scientifiques. Ses Pensées sont des notes dispersées, fragmentaires, qui ont été rassemblées, pascal travaillant à l’écriture d’une Apologie de la religion chrétienne qui ne fut jamais achevée. il y lutte contre les « puis- sances trompeuses », telles que l’imagination, la coutume ou l’amour propre. pascal veut démontrer scientifiquement que l’homme a tout intérêt à parier pour l’existence de Dieu.

« Qu’est-ce qu’un homme dans l’infini ? »

« L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature ; mais c’est un roseau pensant ».

n Jean de La Fontaine (1621-1695)

Maître des eaux et forêts comme son père, protégé du surintendant Fou- quet, La Fontaine s’est plu à décrire ses Fables comme une « ample co- médie à cent actes divers ». Directement inspiré du Grec Ésope (Vie siècle av.J.-C.) et du latin phèdre (ier siècle apr. J.-C.), il renouvelle cependant le genre de la fable. La Fontaine a créé une poésie qui lui est propre : la nature y est omniprésente, suggérée plus que longuement décrite. Le fabuliste, malgré la fantaisie de son univers, est aussi un moraliste pragmatique : il tire des leçons de l’expérience. La Fontaine veut enseigner à l’homme l’art de saisir son bonheur, dans un monde parsemé d’obstacles.

n François Marie Arouet, dit Voltaire (1694-1778)

Doté d’un esprit brillant et d’une plume acerbe, Voltaire s’est déjà fait connaîtrepardestragédies.pourtant,cesontsesoeuvres philosophiques qui sont restés plus célèbres (contes, dictionnaire, traité...) Voltaire est très influencé par l’angleterre, qu’il connaît en exil : il y réalise le com- bat qu’il doit mener en France pour la liberté, contre l’intolérance et l’immobilisme. en inventant le conte philosophique, Voltaire détourne le conte de sa vocation d’origine : le divertissement. Le conte devient une arme critique. L’ironie qui le caractérise tire les intrigues vers le burlesque et la parodie : il fait ainsi apparaître un second degré de lecture plus pro- fond. Micromégas est un conte sur la relativité universelle, Zadig pose le problème de la destinée...

« Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes » (Candide) « Il faut cultiver notre jardin » (Candide)

« Zadig disait : « Je suis donc enfin heureux ! » Mais il se trompait. » (Zadig)

n Montesquieu (1689-1755)

issu d’une famille noble de Bordeaux, avocat de formation, Montesquieu s’est intéressé dès sa jeunesse à différents domaines : histoire, sciences naturelles ou physiologie, dans lesquels ses recherches expérimentales ont montré très tôt combien il privilégiait l’observation des faits. Ses Lettres persanes sont une satire des institutions et des mœurs de son époque : il a dû les publier anonymement à amsterdam pour échap- per à la censure. après un grand voyage d’étude dans toute l’europe, Montesquieu analyse, dans L’Esprit des lois, l’évolution des sociétés, leurs lois, leurs gouvernements. Sa vision rationaliste de l’histoire provoque la réaction hostile de l’Église et la mise à l’index de l’ouvrage. Mais, s’il a inspiré les penseurs révolutionnaires, Montesquieu n’est pas républicain. il considère que le régime idéal reste la monarchie.

« Ah ! ah ! Monsieur est persan ? C’est une chose bien extraordinaire ! Comment peut-on être persan ? » (Lettres persanes, XXX)

« Point de monarque, point de noblesse, point de noblesse, point de monarque ; mais on a un despote. » (L’Esprit des lois, II, 4)

Denis Diderot (1713-1784)

responsable, avec d’alembert, de l’Encyclopédie, dont la publication va s’étendre de 1751 à 1777, Diderot écrit parallèlement à cette tâche im- mense des œuvres personnelles très diverses. il approfondit ses théo- ries athées et sa vision matérialiste du monde dans plusieurs ouvrages,

 

 

« Mon imitation n’est point un esclavage.» (Epistre à Huet) « Une morale nue apporte l’ennui.» (Fables, VI, I)
« Je tâche d’y tourner le vice en ridicule.» (Fables, V, 1)

comme la Lettre sur les Aveugles à l’usage de ceux qui voient, le Rêve de d’Alembert, ou les Pensées sur l’interprétation de la nature. Dans ses romans, La Religieuse, Le Neveu de Rameau et Jacques le Fataliste, il aborde des thèmes philosophiques tels que la liberté, la morale. Ses pièces de théâtre appliquent sa théorie du drame bourgeois. Diderot est par ailleurs un critique d’art très fin, cherchant à retrouver dans la peinture les qualités du drame bourgeois.

« L’homme est le terme unique d’où il faut partir et auquel il faut tout ramener », (l’Encyclopédie)

« Il faut souvent donner à la sagesse l’air de la folie afin de lui procurer ses entrées » (Le Rêve de d’Alembert)

« Il est bien évident que je ne fais pas un roman, puisque je néglige ce qu’un romancier ne manquerait pas d’employer ». (Jacques le Fataliste) 

 

QUESTIONS DE FORME

 

  On l'aura compris : la vraie profondeur de La Fontaine n'est pas dans ses idées, mais bien dans son art particulièrement subtil. L'ampleur de ses efforts formels se révèle pour peu que l'on compare les fables d'Ésope aux réécritures auxquelles il s'est livré. Bien que non prise en compte par Boileau dans L'Art poétique, la fable est un véritable genre (elle ressortit au didactique), et La Fontaine, par l'habileté de son partage entre le récit et le discours, l'a rendue particulièrement riche et mobile.

L'art du récit

  La fable est d'abord un récit. Il convient de bien discerner les séquences entre lesquelles se partagent les récits de La Fontaine. Ils ne sont pas continus, ni à vitesse constante. Le fabuliste isole dans chaque fable un petit nombre de moments (deux ou trois, rarement plus) sur lesquels il s'arrête. Les transitions entre ces moments sont très rapides. On peut parler d'une véritable loi d'accélération : La Fontaine, comme tout bon conteur, prend son temps dans les commencements, et brusque presque toujours le dénouement. De ce point de vue, on pourra examiner Le Héron et Le Chat, la Belette et le petit Lapin, ou encore, exemple plus complexe où les épisodes sont relativement nombreux et les variations de la vitesse très savantes,  Les Obsèques de la Lionne.
  Sur le plan de la description, il conviendrait de parler mieux d'évocation, car La Fontaine manifeste un art consommé pour camper en quelques mots la silhouette ou le comportement des animaux ou des hommes (le curé dans Le Curé et le Mort, Le Paysan du Danube). Ceci concerne aussi les évocations de la nature (voir, par exemple, L'Ours et l'Amateur des jardins, Le Songe d'un habitant du Mogol). Il existe un idéal lafontainien du paysage, très classique : c'est souvent un endroit paisible, un peu à l'écart, sans être trop sauvage, en somme la nature corrigée et animée par l'homme. A côté des motifs végétaux, de l'aurore, du soleil, on remarquera la présence de l'eau (voir Le Héron, Le Torrent et la Rivière, Les Poissons et le Berger qui joue de la flûte, l'épilogue).

L'art du dialogue

  "Tout parle en mon ouvrage, et même les poissons." Le dialogue est en effet essentiel dans la technique de la fable. Il est à la fois facteur de vie, auxiliaire puissant de la psychologie et ressort du drame. La parole est toujours un actant essentiel : tantôt elle constitue une faute qui mérite punition (Le Rat et l'Éléphant, Le Vieillard et les trois jeunes Hommes), même si elle reste au niveau du monologue intérieur (La Laitière et le pot au lait, Le Curé et le Mort) ; tantôt les paroles prononcées déclenchent immédiatement la catastrophe (ainsi dans La Cour du Lion, à plus forte raison dans La Tortue et les deux Canards), à moins qu'il ne s'agisse au contraire de paroles habiles qui se voient couronnées de succès (souvent les paroles du renard, celles du cerf dans Les Obsèques de la Lionne) ; tantôt enfin la fable tout entière consiste en débats oratoires (Le Chat, la Belette et le petit Lapin, L'Homme et la Couleuvre).
  Ajoutons un fait stylistique important, qui est un grand facteur de variété : La Fontaine est un spécialiste du maniement des trois discours, direct, indirect et indirect libre (Le Coche et la Mouche ou Le Chat, la Belette et le petit Lapin). On pourra le constater sur notre site dans un inventaire rapide des formes du discours dans La Mort et le Bûcheron.

La versification

  Le vers libre de La Fontaine (on le retrouve à la même époque dans l'Agésilas de Corneille et dans l'Amphitryon de Molière) n'a aucun rapport avec ce qu'on appellera ainsi à la fin du XIXème siècle. Le vers de La Fontaine est libre en ce qui concerne le nombre de syllabes, en ce sens qu'il mêle librement des vers de longueurs différentes, mais il n'emploie que des vers de la prosodie française traditionnelle. Pour l'essentiel, il joue sur l'octosyllabe, le décasyllabe et l'alexandrin, avec quelques vers impairs qui créent des rythmes de chanson. Plus qu'en eux-mêmes, c'est dans leur alternance qu'ils doivent être étudiés, notamment dans leurs effets de rythme. On trouvera d'excellents exemples de cette adéquation du vers aux péripéties du récit dans de nombreuses fables, notamment dans Les deux Pigeons.
 En ce qui concerne les rimes. La Fontaine ne s'en tient pas aux systèmes traditionnels des rimes plates croisées et embrassées; il lui arrive même de redoubler les rimes, faisant rimer ensemble trois vers ou davantage (Le Curé et le Mort. Le Rat et l'Éléphant). Mais ses vers riment toujours, et - qui plus est - il respecte toujours la règle de l'alternance.

Les registres

 

  Les Fables sont caractérisées par une extrême mobilité du ton. Les passages du comique à l'émotion sont constants.
  Le burlesque se caractérise par des plaisanteries diverses. Il y en a beaucoup dans les Fables (expressions inattendues, réflexions insolites), plus particulièrement par le recours plaisant au registre héroï-comique dans des situations triviales. Il existe aussi le procédé burlesque inverse qui emploie un style "bas" pour des sujets nobles (ainsi pour les évocations de la guerre de Troie à propos de poulaillers dans Les deux Coqs et dans Le Fermier, le Chien et le Renard).
  Le registre didactique est présent aussi, bien sûr, notamment dans les discours et pour tout ce qui concerne l'expression de la morale. Aux formes sentencieuses de la leçon, brèves et injonctives, s'ajoutent de petits exposés de vulgarisation scientifique et philosophique, dans le goût de ce siècle féru de commentaires.
  Enfin, nous avons vu que le lyrisme n'est pas rare dans les Fables. Les développements lyriques étendus y sont sans doute peu nombreux. On n'en compte guère que quatre : Un animal dans la lune (à propos de la paix),  Les deux Amis (sur l'amitié), Les deux Pigeons (sur l'amour), Le Songe d'un habitant du Mogol (sur la retraite spirituelle). En revanche, on note un très grand nombre de brèves échappées poétiques, reposant sur des procédés très simples (choix des mots, effets rythmiques, discrètes images). Le registre le plus fréquent du lyrisme dans les Fables est le registre élégiaque, qui trahit surtout chez La Fontaine un penchant récurrent vers la mélancolie.

L'implicite dans le discours

 

Toute communication, qu'elle soit écrite ou orale, repose sur un échange d'informations clairement exprimées (explicites), mais aussi relevant d'un non-dit (implicites). Que sont ces messages implicites ?
• On appelle implicite ce qui n'est pas dit dans un énoncé en termes clairs et que l'interlocuteur doit comprendre par lui-même. Un locuteur peut souhaiter en effet passer sous silence certaines informations, parce qu'elles pourraient choquer ou nuire à sa propre image ou à celle d'autrui.
Ex. : Quand Emily Brent, l'un des personnages d'Agatha Christie dans les Dix Petits Nègres, s'exclame « Quel petit bateau ! » en apercevant le canot automobile qui doit transporter le groupe d'invités à l'île du Nègre, elle révèle implicitement qu'il serait dangereux d'y prendre place en aussi grand nombre et exprime, tout aussi implicitement, sa peur du naufrage.
• On distingue deux sortes d'implicites : le présupposé et le sous-entendu.
Le présupposé :
  • est une information implicite qui se déduit d'un mot ou de plusieurs mots présents dans l'énoncé. ; ex. : Les Dix Petits Nègres » d'Agatha Christie est un roman policier captivant. (Cet énoncé présuppose que certains romans policiers ne sont pas captivants.) ; ex. : « Je vous promets de m'expliquer encore une fois. » (Ce propos, tenu par un personnage du roman, Philip Lombard, présuppose qu'il s'est déjà expliqué.) ;
  • peut servir à manipuler l'interlocuteur, en présentant comme acquise une information qui ne l'est pas.
Le sous-entendu :
  • se distingue du présupposé en ce qu'il ne se déduit pas de l'énoncé lui-même mais de la situation d'énonciation. L'ironie en fait un grand usage. Dans ce cas, le locuteur laisse en effet entendre qu'il pense le contraire de ce qu'il dit. Deux messages sont délivrés : l'un, explicite, mais faux, l'autre, implicite, mais vrai. Ex. : Ainsi, lorsqu'Anthony Marston déclare : « Je bois à la santé des assassins », il n'encourage pas le crime, lui qui va en être victime, mais il traduit plutôt, sous couvert d'ironie, sa peur d'être assassiné. Cependant seule la situation d'énonciation permet de percevoir l'ironie du propos.
  • peut être contenu dans un énoncé sans que le locuteur ait eu l'intention de transmettre l'information. Ce type de sous-entendu est à l'origine de malentendus appelés « quiproquos » au théâtre. Ex. : Ainsi, après avoir découvert sa femme morte dans son lit, Rogers répond au Dr Armstrong qui lui demande si elle a absorbé quelque chose avant de s'endormir : « Hier soir, elle n'a rien pris que ce que vous lui avez donné », sous-entendant involontairement et maladroitement que c'est le Dr Armstrong lui-même qui a tué sa femme.

L'argumentation indirecte : le conte philosophique et la fable

 

 

 

La fable et le conte philosophique sont deux types de textes qui, tout en racontant une histoire plaisante, ont pour fonction de délivrer un message ou une leçon, ou plus largement de susciter la réflexion du lecteur. Leur visée est donc à la fois didactique et argumentative, mais ils empruntent, pour convaincre, les ressorts de la fiction. On peut les trouver groupés sous le terme générique plus large d'apologue (court récit qui vise à démontrer ou à illustrer une leçon de morale), et relèvent de ce que l'on appelle l'argumentation indirecte. Quelles sont les caractéristiques de ces formes ?

 

1. Comment l'argumentation indirecte procède-t-elle ?

 

Comme un essai ou un texte purement argumentatif, le conte philosophique et la fable cherchent à convaincre, à délivrer un enseignement ou à faire réfléchir, mais de manière détournée : c'est le récit qui est chargé de mettre en scène des idées et des valeurs.

 

L'argumentation s'exprime à travers une fiction allégorique, ce qui permet d'incarner des principes abstraits dans des personnages qui en retirent une valeur symbolique : dans la fable de La Fontaine « Le Loup et l'agneau », les deux personnages incarnent de façon immédiatement perceptible le principe du mal et celui de l'innocence ; au-delà de cette dichotomie, le lecteur doit s'efforcer de décrypter la scène afin d'en comprendre les enjeux plus vastes.

 

En principe, la visée pédagogique du conte ou de la fable impose que les situations narratives illustrent sans ambiguïté les valeurs morales défendues par l'auteur. Toutefois, un texte véritablement littéraire ne saurait se satisfaire de cette simplicité. Bon nombre de ces textes ne se réduisent pas à une interprétation univoque, ou en tout cas sèment le doute dans l'esprit du lecteur. Cette tendance est d'autant plus marquée lorsque la morale n'est pas explicite, mais reste implicite, ou lorsque l'auteur recourt à l'ironie, comme par exemple Voltaire dans Candide (1759). Le lecteur averti doit donc se tenir sur ses gardes et prêter attention aux symboles un peu trop évidents. Telle est en effet la différence principale entre une argumentation directe et une argumentation rendue indirecte par la fiction : il ne peut y avoir de stricte équivalence entre les deux, car toute situation fictive, toute symbolisation, rend l'interprétation à la fois plus difficile et plus stimulante. Ainsi, la célèbre fable de La Fontaine « La Cigale et la Fourmi », qui ne comporte pas de morale, peut apparaître comme une critique de l'insouciance (incarnée par la cigale) ou au contraire de la mesquinerie (incarnée par la fourmi).

 

2. Quelles sont les fonctions des fictions argumentatives ?

 

Selon l'auteur latin Horace, le conte et la fable remplissent les deux fonctions classiques de la littérature : instruire et plaire.

 

Les écrivains des Lumières ont fréquemment eu recours à l'apologue dans un but de critique du pouvoir et des institutions. La fiction permet en effet de contourner plus facilement la censure en offrant un premier niveau de lecture tout à fait inoffensif, qui peut s'avérer très subversif lorsqu'il est interprété. L'apologue prend alors une nouvelle dimension : son objectif n'est pas de délivrer un message unique, mais d'inciter le lecteur à la réflexion.

 

Le conte comme la fable peuvent aborder tous les sujets et livrer des enseignements dans toute sorte de domaines. La leçon peut aussi bien être morale que sociale, politique ou philosophique.

 

La fonction ludique ne doit pas être oubliée pour autant. Si la fiction est préférée à l'essai austère, c'est parce qu'étant plaisante, elle retient davantage l'attention et permet de s'adresser au plus grand nombre. En tant qu'œuvres littéraires, le conte et la fable sont aussi conçus pour procurer un plaisir esthétiqueLes Fables de La Fontaine sont d'ailleurs moins lues aujourd'hui pour la morale que l'on peut en tirer que pour leur inventivité littéraire unique.

 

3. Quelles sont les caractéristiques de la fable ?

 

La fable est un genre littéraire très ancien. Ses origines remontent à l'Antiquité, avec l'auteur grec Ésope du vie siècle avant J.-C. et avec Phèdre, fabuliste latin du ier siècle après J.-C. En France, le genre est développé magistralement au xviie siècle par La Fontaine, qui en publie deux recueils. Ses fables ont, dès leur publication, connu un très grand succès qui ne s'est jamais démenti depuis. D'autres auteurs, comme Florian, Queneau ou Anouilh ont également pratiqué ce genre.

 

La fable est un récit bref, en vers ou en prose, qui repose sur une structure narrative rythmée et qui peut jouer sur des effets de coup de théâtre. Ses personnages sont souvent des animaux, mais peuvent également être des êtres humains, voire des éléments naturels ou des objets. Le cadre de la fable est en général indéterminé et s'inscrit bien souvent dans un univers merveilleux.

 

La morale, si elle est présente, peut se trouver aussi bien au début qu'à la fin du récit. Parfois, elle reste implicite et le sens de la fable peut alors se révéler ambigu. En tout cas, la fable reste un récit plaisant, présentant une dimension ludique mais aussi esthétique, d'autant plus soulignée lorsqu'il s'agit de fables versifiées.

 

4. Qu'est-ce que le conte philosophique ?

 

L'alliance de ces deux mots est en elle-même un défi : le conte, genre léger, associé à la tradition populaire et aux récits pour enfants, est caractérisé par l'adjectif philosophique qui évoque une méditation des plus sérieuses. Or, tel est justement l'enjeu de ce genre d'apologue : produire une fiction vive et plaisante, de facture traditionnelle, qui permette la réflexion philosophique profonde.

 

En France, l'âge d'or du conte philosophique se situe au xviiier siècle. Les philosophes des Lumières l'ont pratiqué avec bonheur pour diffuser leurs idées, s'inspirant entre autres de la tradition du conte oriental, relayée par la traduction en français du recueil des Mille et Une Nuit, au tout début du siècle. Voltaire est résolument le maître du genre, avec des œuvres comme Zadig (1747), Micromégas (1752), Candide (1759), qui se caractérisent toutes par leur humour, leur vivacité et bien sûr leur ironie.

 

Le conte philosophique est un récit en prose, relativement bref – mais plus long que la fable. Même si le récit entretient toujours des liens avec l'actualité, il tient du conte par certains traits merveilleux, par certaines péripéties ou épisodes peu vraisemblables. Là encore, il s'agit d'un texte plaisant et ludique, comportant souvent des aspects comiques. Les personnages en général peu nombreux ont une psychologie assez sommaire et sont caractérisés par quelques traits essentiels. Ainsi, Candide est un personnage fondamentalement naïf, qui découvre le monde avec une grande candeur, comme l'indique son prénom.

 

5. Quelles sont les autres formes d'apologues ?

 

Outre le conte philosophique et la fable, il existe d'autres formes d'apologues que nous pouvons signaler à titre indicatif :

 

  • la parabole : il s'agit des premiers apologues de l'ère chrétienne. Ils sont présents dans les Évangiles et permettent au lecteur de mieux comprendre, de façon imagée, certains enseignements chrétiens (exemple : la parabole de l'enfant prodigue) ;
  • l'utopie : le mot « utopie » vient du grec u topos qui signifie « lieu qui n'existe pas » et désigne en littérature l'évocation d'un lieu imaginaire, d'une société idéale qui, par contraste avec la société réelle, doit faire réfléchir le lecteur sur le monde qui l'entoure. L'Utopie de Thomas More (1516) est l'ouvrage fondateur du genre. L'utopie peut également être incluse dans un récit. Ainsi, Candide découvre le monde utopique de l'Eldorado.

 

On peut qualifier de contre-utopies les représentations littéraires d'une société sombre et noire, telle que celle dépeinte par George Orwell, dans son roman 1984 ;

 

  • la nouvelle ou le roman à thèse : certains récits défendent une idée ou offrent une critique évidente, véhiculées par la fiction elle-même. On peut alors les lire comme des apologues. (exemple : La Peste de Camus) ;
  • le théâtre : certaines pièces peuvent également être lues comme des apologues. Beaumarchais lui-même remarque dans sa préface au Mariage de Figaro : « La fable est une comédie légère, et toute comédie n'est qu'un long apologue ».

 

La citation

 

«  Une morale nue apporte de l'ennui.
Le conte fait passer le précepte avec lui.  »

 

L'implicite dans le discours

 

Toute communication, qu'elle soit écrite ou orale, repose sur un échange d'informations clairement exprimées (explicites), mais aussi relevant d'un non-dit (implicites). Que sont ces messages implicites ?

 

• On appelle implicite ce qui n'est pas dit dans un énoncé en termes clairs et que l'interlocuteur doit comprendre par lui-même. Un locuteur peut souhaiter en effet passer sous silence certaines informations, parce qu'elles pourraient choquer ou nuire à sa propre image ou à celle d'autrui.
Ex. : Quand Emily Brent, l'un des personnages d'Agatha Christie dans les Dix Petits Nègres, s'exclame « Quel petit bateau ! » en apercevant le canot automobile qui doit transporter le groupe d'invités à l'île du Nègre, elle révèle implicitement qu'il serait dangereux d'y prendre place en aussi grand nombre et exprime, tout aussi implicitement, sa peur du naufrage.

 

• On distingue deux sortes d'implicites : le présupposé et le sous-entendu.
Le présupposé :

 

  • est une information implicite qui se déduit d'un mot ou de plusieurs mots présents dans l'énoncé. ; ex. : Les Dix Petits Nègres » d'Agatha Christie est un roman policier captivant. (Cet énoncé présuppose que certains romans policiers ne sont pas captivants.) ; ex. : « Je vous promets de m'expliquer encore une fois. » (Ce propos, tenu par un personnage du roman, Philip Lombard, présuppose qu'il s'est déjà expliqué.) ;
  • peut servir à manipuler l'interlocuteur, en présentant comme acquise une information qui ne l'est pas.

 

Le sous-entendu :

 

  • se distingue du présupposé en ce qu'il ne se déduit pas de l'énoncé lui-même mais de la situation d'énonciation. L'ironie en fait un grand usage. Dans ce cas, le locuteur laisse en effet entendre qu'il pense le contraire de ce qu'il dit. Deux messages sont délivrés : l'un, explicite, mais faux, l'autre, implicite, mais vrai. Ex. : Ainsi, lorsqu'Anthony Marston déclare : « Je bois à la santé des assassins », il n'encourage pas le crime, lui qui va en être victime, mais il traduit plutôt, sous couvert d'ironie, sa peur d'être assassiné. Cependant seule la situation d'énonciation permet de percevoir l'ironie du propos.
  • peut être contenu dans un énoncé sans que le locuteur ait eu l'intention de transmettre l'information. Ce type de sous-entendu est à l'origine de malentendus appelés « quiproquos » au théâtre. Ex. : Ainsi, après avoir découvert sa femme morte dans son lit, Rogers répond au Dr Armstrong qui lui demande si elle a absorbé quelque chose avant de s'endormir : « Hier soir, elle n'a rien pris que ce que vous lui avez donné », sous-entendant involontairement et maladroitement que c'est le Dr Armstrong lui-même qui a tué sa femme.

texte 1 : Emile ou l'éducation

 

 

 

I.               Un texte argumentatif

 

 

 

Le but : remise en cause de l’ordre social, plaidoyer pour le travail des nobles, apprendre un métier manuel, L’abolition des privilèges

 

 

 

  1. une construction syntaxique solide : les parallélismes, répétitions, anaphores, rythmes ternaires, effets d’allitérations et de paronomase qui donnent une évidence au texte. Gradations
  2. une batterie d’exemples et de métaphores : utilisation d’image concrètes, par exemple pour expliquer qqch de philosophique : le brigand et le voleur, utilisations des exemples concrets du palais en ruine, des métiers ( maître d’école, greffier), de noms proproes et utilisation du démonstratif.

 

 

 

  1. une stylistique du syllogisme, de la démonstration évidente

 

 

 

L’argument de la relation causale : «  celui mange dans l’oisiveté … » celle-ci est rétablie et montre l’absurdité de l’absence de lien causal : il faut travailler pour manger, or, il y en a qui mangent sans travailler, ils sont donc des voleurs

 

D. une rhétorique délibérative

 

Que faut-il faire dans le futur ? un txete fondé sur l’opposition entre présent et futur ( cf l. 1-3)

 

II. Quel type de texte ? (un texte inclassable)

 

 

 

-        moraliste antique : apprentissage religieux et moraliste de l’humilité : référence à la morale chrétienne des Béatitudes  ( idée que els premiers seront les denriers)fondée sur l’inversion : «  heureux les pauvres, le royaume des cieux est à eux », moraliste : hérite peut-être même de Bossuet ( sermon sur le mauvais riche), ou de la bruyère : Champagne, ou sur les vaniteux, et également philosophique : Sénèque, lettres à Luculius -emprunt à l’ancienne sagesse antique, stoïcienne : supporter avec constance les coups du sort + utilisation de l’image ancienne de la roue de fortune+

 

-         

 

-        philosophique : idées développées dans le contrat social, les notions de propriété , la place de l’homme dans la société, les écrits des lumières

 

 

 

-        pamphlétaire ? ressemble à la harangue, avec les questions rhétoriques, avec les insultes à peine déguisées, avec les avertissements prophétiques annonçant la ruine d’un classe sociale, et même l’encourageant.

 

 

 

III. Une nouvelle vision de l’homme et de la société est proposée :

 

 

 

                        A. de l’homme : il ne doit pas se dé finir selon un avoir, ou quelque chose qui              est extérieur à lui, par son état qui peut selon son expression, le « quitter », il ne                     veut pas de cet homme «  qui ne sait point user de lui-même, et [qui] ne met                 son être que dans ce qui est étranger à lui » ( l. 10), autrement dit, celui qui                         s’appuie sur ses titres nobiliaires, sur sa célébrité + idéal de constance,                                     adaptation au sort, humilité et courage.

 

B.    de l’homme dans la société :  l’homme ne doit pas profiter des avantages dont il bénéficie dans la société, mais fournir à la société sa part de travail, étant donné qu’il va aussi profiter des biens qu’elle lui fournit. La société est donc considérée comme un lieu où sont mis en commun les biens et vers laquelle sont dédiés tous les efforts. l’homme se définit donc par rapport à son utilité à al société, mais loin d’une gloire inutile et fragile.

 

C.    du rôle de la transmission : les parents ne doivent plus transmettre un capital et des avantages, mais orienter leurs enfants vers un savoir faire

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

texte 2:

 

Lettre au comte de Lastic

 

 

 

Introduction :

 

Situation familiale de Rousseau, la famille Levasseur

 

Le réseau d’aides qui s’est organisé autour de sa belle famille

 

Les relations avec le voisinage

 

 

 

problématique : en quoi consiste la critique de Rousseau et quels en sont les procédés?

 

 

 

I.  La superposition des schémas de communication

 

 

 

a. le trajet complexe du beurre

 

crée une confusion entre les destinateurs et les destinataires

 

b. le trajet complexe de la parole

 

-Rouseau feint de parler au nom de la mère de Therese ,

 

-il s'adresse aux nobles sous le couvert de son adresse à Mme Levasseur

 

-Des discours enchâssés : l’utilisation du discours indirect

 

c. une expression complexe des tonalités

 

-qui commence en douceur, la captatio benvolentia et se fait de plus en plus acrebe, ce qui revient à lire le début comme une attaque masquée.

 

-tonalité pathétique : "la pauvre femme, affligée"

 

- tonalité polémique : selon l'usage: insulte

 

- retour a une politesse mensongère : l.17 -18

 

        

 

toutes ce tonalites nous montrent que le texte a plusieurs niveaux de lectures, en effet l'interet de la lettre repose sur le mécanisme de l'rinoie que nous....

 

 

 

II. Le mécanisme de l'ironie

 

 

 

a. l'antiphrase, que s'il vous en a coûté quelque chose, + excuses fournies.

 

la ligne 1 et 2. a la ligne 18

 

b. la citation, ou polyphonie: que respect et humanité sont des mots roturiers

 

c. ambiguité qui peut déstabiliser le destinataire.

 

 

 

 

 

III. Le contenu notionnel :

 

Rousseau critique le fait que la noblesse préfère la propre qualité de noble à des qualités plus humaines, qui sont celles de la justice et de l’humanité.

 

a. Les valeurs soutenues par Rousseau

 

b. Les pratiques critiquées par lui

 

c. cette lettre est un reflet de ses choix theoriques et pratiques dans sa vie: comment etre proche du peuple, leur envoyer du beurre ou parler en leur nom?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La succession des concernés : s’il est vrai que thérèse n’a pas réussi à lui faire rndre le beuure, c’et parce qu’elle ne maîtrise pas les règles du grand monde et du langage. On voit se dessiner en creux une différence entre l’attitude simple et soumise de thérèse, et celle vindicative et assurée de rousseau.

 

 

 

 

 

La façon rousseau présente les choses est d’autant plus cinglante qu’il englobe un persoannge particulier dans l’ensemble d’une classe sociale, qui partagerait ainsi ses travers.

 

 

 

Autre façon de présenter révoltante : Il explique que cette pratique, qui aurait pu être le résultat d’une erreur, est seulement l’application des préceptes injuste de ce monde , fondés sur l’inégalité, l’orgueil attaché à leur caste et les mépris des autres besoins des autres.

 

 

 

Il ne s’agit donc pas pour rousseau d’une simple erreur ;d’un malentendu, cette pratique ets la conséquence directe de la manière de penser du grand monde. Aisni, à partir d’un événement unique , il en déduit toute une série de remarques générales sur le fonctionneent d’une société. Là où il n’y aqu’une injustice entre deux personnes, il l’étend à un nombre indéterminé de personnes. Thérèse, ou encore sa mère, deviennt ainsi représentatives du «  pauvre ». les gens, c’est-à-dire les domestiques deviennent des émissaires de l’injustice, auquels les nobles communiquent exprès leur mépris.

 

 

 

Mais à part cette généralisation, la présentation de rousseau est implacable : on ne peut bien sûr pas , par exemple, contredire le fait que cette «  pauvre » en question est venue réclamer son bien.

 

 

 

Les marques d’hyperbole qui fondent l’ironie «  elle est trop » honoré qu’un comte ait mangé son beurre » : le procédé est le suivant : en reprenant la parole de l’autre , de l’ennemi, en l’incluant dans sa propore parole, on la déforme. Cela permet d’enlever toute crédibilté à la parole de l’autre en montrant combien elle est absurde.

 

 

 

La délégation de parole : les termes introductifs de discors explicatifs : «  je lui ai prouvé que » j’ai tâché de la consoler »

 

 

 

 

 

Pour expliciter le temre de grand monde et de grande éducation , l’on pourrait dire que les nobles ont pour pratique de ne daigner prêter l’oreille ( respecter) que ceux qui sont de leur classe et de leur milieu.

 

L’accusation se résorbe en persiflage :

 

Contrairement à un jugement, rousseau donne une suite imprévue à son réquisitoire :au lieu de demander une rétribution, une compensation, un dédommagement, il fait comme si la faute venait de sa part (il est en quelques sortes entraîné par son propre discours antiphrastique) : au lieu de demander un dédommagement, c’est donc lui qui l’offre.

 

Ce faisant, il accable , écrase le destinataire de honte par sa bienveillance feinte. Il y a donc un contraste entre le contenu de la lettee : une forte accusation contre l’égoîsme et le mépris de personnes comme lui, et en contrepartie, dans les faits, l’offre de l’argent et d’excuses, en inversant les rôles, il place le comte en porte à faux : pousse jsuqu’au bout l’injustice, il lui montre en effet à quel degré d’absurdité l’on pourrait aboutir si l’on allait dans le sens de personnes comme cela. Cette pratique vise à modifier le point de vue du comte : celui-ci osera-t-il accepter l’argent, par exemple ?  cette offre peut aussi s’inscrire dans la lignée de ses propos ironiques, dans la mesure où cette offre d’excuses et d’argent est qulifiée de «  juste » «  comme il est juste »

 

 

 

 

 

texte 3 : Voltaire : article, de l'autorité politique

 

 

 

Intro : le dix huitième siècle a vu se développer de multiples essais qui prenaient des formes moins sophistiquées, plus limpides mais qui développaient  davantage le modèle antique : réflexion plus simple, imagée.

 

Le dix huitième siècle : entre deux révolutions.montesqieu , dans ll’esprit des lois, « L’Angleterre ets à présent le plus libre ays qui soit au monde, et j en’en excepte aucune République ; j’appelle libre parce que le prince n’a le pouvoir de aire aucun tort imaginable à qio que ce soit, par la raison que son pouvoir est borné par un acte. » ( Notes de voyage en Angleterre) : » Depuis la Révolution de 1688, l’élimination du roi catholique Jacques II, le nouveau roi Guillaume d’Orange ne peut prétendre à l’absolutisme de droit divin, puisqu’il a été appelé par le parlement. L’Angleterre est en train d’installer un régime qui deviendra proprement parlementaire.

 

Souffraient de la censure officielle, alors qu’en fait les lumières pénétraient la ville, la cour, littérature clandestine et en plus bénéficiaient de protecteurs.

 

Arbitraire des lettres de cachet, emprisonnements

 

Fable du bossu texte 1

 

 

 

A . une construction stable, une argumentation claire

 

 : le récit est encadré par des phrases plus claires au niveau conceptuel qui montrent ce que voltaire veut démontrer. » : «  comment un homme a-t-il pu devenir le maître d’un autre homme » : il s’agit de la question de domination, et enfin, à la fin est énoncé clairement l’idée que  la violence et les lois ont crée l’inégalité. Le rythme binaire de la dernière phrase donne à la fin du texte un caractère démonstratif irréfutable.

 

Même dans le reste, le vocabulaire est assez simple

 

 

 

B. l’agrément du récit

 

B.1 l’utilisation de la fable : système métaphorique, déplacement géographique, usage de la simplicité ( discours narratif à visée argumentative : apologue)

 

B. 2 Dimension comique :

 

-       Caricature du bossu, des personnages, de la rapidité avec laquelle se passe l’histoire, de la simplicité des actions (assommer), utilisation des asyndètes.

 

 

 

C. Retournements et palinodies

 

C1.Retournements : les actions ne sont pas systématiques : absence de succession du pouvoir

 

C.2 Palinodie :

 

1. la fable indienne dit l’inverse de la fable siamoise

 

2. dit que les fables ont tout dit : peut s’entendre dans deux sens différents : ( antanaclase ) : soit elles expliquent tout, soit elles disent tout et son contraire)

 

3.     Ainsi, il fait croire que tout s’explique avec des fables, mais en fait c’ets sans les fables qu’il explique le plus clairement possible ce qu’il veut démontrer , ainsi se termine par un refus de l’explication étiologique et temporelle «  j’ignore ce qui est arrivé dans l’ordre des temps » : ( se moque de la construction temporelle de l’état de nature chez Rousseau), puisqu’il propose in fine un autre ordre, celui de la nature, «  les hommes naissent tous égaux » : ainsi le texte est contradictoire parce qu’il semble faire l’éloge d’un mode d’explication, qu’il rejette ensuite plus ou moins, puisque le présupposé (tous les hommes sont égaux ) n’a pas fait l’objet d’une démonstration, il est considéré comme acquis.

 

 

 

II. satire du pouvoir royal :

 

A. Une étiologie polémique du pouvoir : qui n’est fondé que sur la force

 

B. une description satirique de l’exercice du pouvoir

 

-Indignation feinte : expression «  magie incompréhensible », répétition de la question avec  gradation de «  un seul », puis « plusieurs hommes»

 

-une critique implicite de la population (qui cède à la force)

 

- évolution de la critique : elle concerne aussi les moyens plus raffinés de la domination, comme, l’usage des lois et de la religion, et la théorie de la royauté de droit divin.

 

C. un texte à clés, les idées des lumières :

 

- absence de force : les lettres de cachet, critique ou allusion à la révolution anglaise.

 

-Un texte fortement intertextuel (cf :  Hobbes, selon lequel l’homme est un loup pour l’homme et le pouvoir n’a de fondement que par la force, cf :Montesquieu et Rousseau qui voudraient que les souverains se préoccupent du bien public et pas seulement de leurs biens personnels, la Boétie, qui inviterait même le peuple à se rebeller contre cette soumission servile et zélée.)

 

 

 

III. implications esthétiques ambigües

 

 

 

a.     Réflexion sur la parole et la loi

 

=>Remise en cause des discours longs et subtils des «  bons volumes », remise en cause des images, utilisation de la palinodie.

 

=> méfiance à l’égard de la loi :

 

b.     Confiance apportée au rôle de l’image : cf Alain Boissinot : «  dans le texte argumentatif, la métaphore n’est ni ornementale, ni poétique, elle est un outil essentiel de l’argumentation » : ici, la simplicité des actions du géant montre aussi celle du vrai roi. 

 

c.     => mais aussi finalement , rejet de l’image pour l’utilisation de la parole d’autrui comme axiome: «  les hommes naissant tous égaux » : retour de la philosophie conceptuelle et des présupposés.

 

d.     Le féérique au service d’une interrogation ( cf le conte philosophique) le narrateur se met ici dans une posture d’étonnement, qui lui donne une fausse innocence.

 

 

 

Autres plans possibles :

 

I. Les moyens du détournement :

 

a. didactique de la fable : comique et caricature

 

b. variation des interprétations :du relativisme à l’article philoisophique

 

c. le texte à clés

 

 

 

II.L’évolution de la critique du pouvoir:

 

a.     par la force,

 

b.      par la religion,

 

c.     par les mauvaises lois

 

 

 

III. Le but de cet article :

 

a.     instruire et plaire,

 

b.     satirique, comiques)

 

c.     entrer en concurrence ou en résonance avec d’autres pensées philosophiques,

 

 

 

texte 5 : MONTESQUIEU, L'esclavage des nègres   (L'Esprit de lois, livre XV, chapitre V, 1748)

 

 

 

REPERES HISTORIQUES ET LITTERAIRES

 

L'esclavage n'est pas, au XVII° siècle une invention récente. Il est issu du droit de la guerre, de la nécessité économique (grands domaines, mines...), de l'organisation sociale ou des insuffisances techniques. Il ne reconnaît aucun statut juridique à l'esclave. Cf la protestation (mais pas la condamnation du phénomène) de  Sénèque dans une Lettre à Lucilius (47).
Mais la "traite" est un fait nouveau : trafic triangulaire (Europe, Afrique, Amérique), grandes Compagnies et ports florissants (Nantes, Bordeaux).

 

Position des autorités politiques et religieuses :

 

Il s'agit d'une institution légalement officialisée par un édit de 1685 et patronné par les ministres. Choiseul déclare :"La traite des noirs mérite plus de protection que toute autre, puisqu'elle est le premier mobile des cultures."

 

"Louis XIII se fit une peine extrême de la loi qui rendait esclaves les nègres de ses colonies ; mais quand on lui eut bien mis dans l'esprit que c'était la voie la plus sûre pour les convertir, il y consentit." (Montesquieu, De l'esprit de lois, XV, 4)

 


Au XVII° siècle, Bossuet qui a pourtant pris position avec générosité sur la question de la justice et de la charité admet encore que le Saint-Esprit "ordonne aux esclaves, par la bouche de Saint Paul de demeurer en leur état et n'oblige pas les maîtres à les affranchir." (Avertissement aux Protestants, article 50)

 

Remarque : le mot "nègre" n' a pas de valeur péjorative au XVIII° siècle ; c'est le nom qu'on donne en général aux habitants noirs de l'Afrique. "Quand les Portugais découvrirent la côte occidentale de l'Afrique, ils donnèrent aux peuples noirs qui l'habitent le nom de "negro", qui signifie "noir" ; de là vient notre mot "nègre" ; on dit plutôt les "nègres" en parlant des habitats de la côte occidentale d'Afrique que les Noirs". (dictionnaire Littré).

Montesquieu lui-même est actionnaire de la Compagnie des Indes. Cependant il est le premier à flétrir avec tant de vigueur un tel scandale : asservissement inique et préjugé racial (même s'il ne juge pas tout à fait les Nègres comme les égaux des Européens).
Ce texte est l'aboutissement d'une longue maturation. Il a parlé de la couleur des Noirs dans la Lettre persane  59 et du rapport entre esclavage et religion dans la Lettre 75. Dans De l'esprit des lois, il est conduit logiquement à étudier les relations entre les lois théoriques et les conditions réelles et infiniment variables dans leur application selon les moeurs, les climat, les traditions. Il en  résulte de généreuses prises de position contre l'intolérance, le fanatisme, l'injustice, etc. C'est dans cet esprit qu'est rédigé ce texte.

 

 

 

Livre XV : "Comment les lois de l'esclavage civil ont du rapport avec la nature du climat."

 

Montesquieu réfute le justification du servage antique, puis critique le servage politique. Le climat chaud entraîne l'indolence qui, elle, favorise le despotisme, les régimes autoritaires. Or, l'esclavage, au nom de principes humanitaires raisonnables, est un phénomène condamnable qu'aucune théorie ne peut justifier. "La raison porte à l'humanité" (XV, 3). Ainsi la théorie des climats se trouve limitée par la condamnation du moraliste.

 

 

 

REPERES CONCERNANT L'ESCLAVAGE

 

 

 

Avant Montesquieu, d'autres voix s'étaient élevées :

 

-        Sénèque

 

-        Bartholomè de Las Casas : défenseur des Indiens contre les Conquistadores. 1542, Histoire admirable des horribles insolences, cruautés et tyrannies exercées par les Espagnols ès Indes Occidentales, brièvement décrites en langue castillane.

 

 

 

Après Montesquieu :

 

-        Abraham Lincoln

 

-        Mrs Beecher-Stowe, La Case de l'Oncle Tom, 1851.

 

-        Richard Wright, Black Boy, 1945 ; Les enfants de l'Oncle Tom, 1938.

 

-        Martin Luther King ...

 

 

 

Etapes de l'abolition :

 

-        1794 : abolition par la Révolution française ; mais le Consulat le rétablit

 

-        1815 : le Congrès de Vienne le condamne solennellement

 

-        1833 : l'Angleterre proclame l'abolition

 

-        1846 : la Suède

 

-        1848 : le Danemark et la France. Victor SCHOELCHER (1840, Abolition de l'esclavage), sous-secrétaire d'Etat dans le Gouvernement provisoire de 1848, il contribua à faire adopter le décret sur l'abolition de l'esclavage

 

-        1856 : le Portugal

 

-        1860 : la Hollande

 

-        1865 : les Etats-Unis, après la Guerre de Sécession, 1860-65

 

-        1885 : l'acte de Berlin engage la suppression de l'esclavage en Afrique même

 

-        1888 : le Brésil

 

Plan de commentaire composé

 

INTRODUCTION

 

Idée de départ : la Guerre de Sécession

 

Sujet ;

Annonce du plan

 

 

 

DEVELOPPEMENT

 

 

 

I° PARTIE : Montesquieu dénonce en premier lieu  les conceptions xénophobes de ceux qui refusent aux noirs la qualité d'êtres humains.

 

 

 

1° § Il montre d'abord le ridicule des préjugés occidentaux concernant  les aspects physiques des "nègres".

 

1° IA : la couleur de la peau et la forme du nez : "noirs depuis les pieds jusqu'à la tête", comme s'il pouvait en être autrement ! On leur reproche d'être "noirs" par excès ! Puérilité de l'adverbe dans l'expression  "nez si écrasé" (argument ad personam)

 

2° IA : l'âme : dérision et absurdité du rapprochement entre l'aspect extérieur et la spiritualité, la nature profonde de l'homme ; préjugé raciste : la "laideur" extérieure préjuge de celle de leur âme.

 

3° IA : Il accumule d'ailleurs les périphrases dépréciatives par lesquelles les Européens désignent les noirs dont ils font des outils : "ceux de l'Afrique" (s.e.  : "peuples", terme qui implique de l'humanité), "ceux dont il s'agit" , "ces gens-là", "s'en servir", toutes expressions qui les déshumanisent.

 

 

 

2° § Montesquieu souligne en outre la relativité des moeurs.
1° IA : Relativité de la valeur des objets selon les cultures : verre et or ; cf la reprise de l'expression "une si grande conséquence" comme à propos des Égyptiens : l'attitude des Européens vis-à-vis de l'or est donc aussi peu rationnelle ...

 

2° IA : Relativité du symbolisme des couleurs : noir et blanc n'ont pas la même signification pour les Blancs et pour les Noirs ... Cf la Lettre persane 59 (1721): "je ne suis pas surpris que les Nègres peignent le diable d'une blancheur éblouissante et leurs dieux noirs comme du charbon".
Le préjugé de la couleur était vivace au XVIII° siècle, la pigmentation des Nègres est une énigme : cela figure en 1741 comme sujet de concours à l'Académie de Bordeaux dont Montesquieu est membre. Comment s'apitoyer sur des êtres si différents de nous ? Comment peut-on être si  ... noir ?
Les récits de voyage avaient d'ailleurs fortement contribué au XVIII° siècle à la notion de relativité.

 

 

 

3° § Mais c'est surtout l'absurdité de l'attitude xénophobe qui est mise en évidence. L'observation de la progression thématique montre que tout le raisonnement s'autodétruit.
1° IA La progression est d'abord linéaire dans les cinq premiers alinéas. L'auteur examine le "droit" de "rendre les nègres " (thème) "esclaves" (propos) ; cette mise en esclavage (thème) a permis de "défricher" l'Amérique (propos) ; ces "terres" (thème) produisent du "sucre" (propos) à un prix rentable puisque produit par des "esclaves" (propos) ; ces "esclaves" (thème) "sont noirs" (propos) ; cette couleur de peau (thème) explique l'attitude des Européens.
2° IA La progression se poursuit à thème constant dans les alinéas 6 à 9 comme pour souligner cette obsession de la "couleur de la peau" ("sont noirs, un corps tout noir, la couleur, les noirs, la couleur de la peau, les nègres, ces gens-là") : "La couleur de la peau" "constitue l'essence de l'humanité" et "on peut juger de la couleur de la peau par celle des cheveux" ; la "couleur de la peau" constituerait donc un critère d'humanité aussi important que la "couleur des cheveux" ; or, ce critère de la couleur des cheveux, qui permet de "tuer" les "hommes roux", est inacceptable pour un esprit européen du XVIII° siècle ; l'apparence extérieure qui est d'une "si grande conséquence" chez les uns n'a pas du tout la même "conséquence " chez les autres ; le critère de la couleur de la peau pour "juger" de l'humanité d'un individu doit donc être remis en cause : la couleur de la peau n'a pas plus de "conséquence" que la couleur des cheveux pour "juger" si on a affaire ou non à un "homme" ; et ce n'est pas la couleur de la peau qui "constitue l'essence de l'humanité" quoi qu'en pensent les "peuples d'Asie" !
Remarque : Montesquieu a pris ce détail dans Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, I,88 : Typhon, principe du mal, avait tué son frère Osiris ; Isis, la femme-sœur d'Osiris avait tué Typhon pour le châtier ; d'où le sacrifice des hommes roux (puis d'un bœuf roux), car Typhon était roux.